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et durable. Les révolutionnaires et socialistes purs l’ont bien compris, qui ne veulent pas d’institutions mutualistes dans les syndicats, de peur que ceux-ci ne cessent d’être exclusivement les instrumens de lutte de classe dont ils rêvent.

Qu’un pouvoir radical, jacobin ou césarien, soit ennemi par essence des fortes associations, propres à garantir l’individu contre les excès d’une autorité trop centralisatrice, nous le comprenons à merveille. Un tel pouvoir développera de préférence les sociétés de secours mutuels non professionnelles, se recrutant dans tous les métiers, et qui, sans base sociale profonde, sont enclines à devenir de simples sociétés d’assurances. Bien qu’il y ait assurément de fort belles et intéressantes sociétés de secours mutuels non professionnelles, — et nous sommes les premiers à rendre hommage aux services qu’elles rendent, — ayons soin de nous mettre en garde, à l’occasion, contre certaines illusions mutualistes. Gardons nos préférences pour la mutualité homogène, celle qui est formée par des professionnels, ayant des intérêts identiques, et qui en feront un des meilleurs organes de pacification sociale que l’on puisse introduire dans les syndicats[1].

Avec les œuvres mutualistes, dans lesquelles nous ne devons pas oublier les caisses de retraites, il y a lieu de mentionner d’autres institutions d’amélioration économique comme éminemment propres à renforcer la vie syndicale. Citons parmi elles la coopération sous ses formes nombreuses et si ingénieuses. Ce sont par exemple des ouvrières de petits ateliers ou des ouvrières à domicile qui, mettant en commun divers objets, produits de leurs travaux, iront directement en offrir un stock suffisant à un grand magasin. Supprimant l’intermédiaire, elles bénéficieront ainsi pour elles-mêmes du profit ou de la commission que ce dernier prélevait auparavant.

Une autre forme de la coopération consiste dans les remises, faites par les fournisseurs, quand des syndiquées se réunissent en assez grand nombre pour leur apporter des commandes importantes et obtenir par ce moyen des prix de faveur. Dans de nombreuses associations syndicales on use de ce procédé, et les membres en arrivent ainsi à retirer un bénéfice plus que suffisant pour rémunérer les diverses caisses qui fonctionnent dans leur association.

  1. Voyez notre article : Les Sociétés de secours mutuels, dans la Revue du 1er juillet 1903.