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parcourir. Ce qu’il a voulu raconter, ce n’est pas l’histoire des querelles religieuses que déchaîna et entretint entre Rome et Byzance, durant plusieurs siècles, le schisme de Photius, mais celle des rapports du Saint-Siège avec la Russie, à partir du concile de Bâle, et des tentatives des Papes, incessamment renouvelées, pour ramener les souverains moscovites et leurs sujets dans la communion romaine. Ces rapports et ces tentatives, à leur origine, se lient si étroitement à l’histoire religieuse de l’empire byzantin qu’il faut, pour les bien connaître et les comprendre, en demander la clé à celle-ci. De là, nécessité, pour nous conduire à Kief, la cité sainte, et à Moscou, capitale au XVe siècle des États « du roi de Russie, » de nous faire passer par Constantinople.

C’est des Grecs, en effet, que les Russes avaient reçu le christianisme et, probablement, par l’action de saint Ignace patriarche de Byzance au temps du schisme de Photius dont il fut l’indomptable adversaire. Depuis cette époque, la Russie, religieusement parlant, dépendait du patriarcat grec. Le chef de son Église, désigné sous le nom de métropolite de Kief, était nommé par ce patriarcat ou, tout au moins, son élection devait-elle, pour devenir définitive, être revêtue de son consentement. A cela, d’ailleurs, semblent s’être longtemps bornées les preuves d’intérêt que les empereurs grecs accordaient au souverain moscovite. Lors de l’invasion mongole, il ne reçut d’eux aucun secours, et cette indifférence se fût sans doute prolongée si, au moment où les évêques réunis à Bâle discutaient, comme on l’a vu, sur le point de savoir en quelle ville se réunirait le Concile général dont le principe venait d’être admis, l’imminence du péril ottoman n’eût suggéré à Jean Paléologue, alors en possession du trône de Byzance, l’idée d’employer la Russie contre les Turcs. Le moine Isidore était alors à Bâle comme envoyé de l’Empereur, et c’est lui qui fut désigné pour aller demander l’appui du souverain de Moscou, le grand Kniaz, Vasili II.

Ce n’est pas en cette seule qualité qu’en 1437 il se mit en chemin. Peu de temps avant, le métropolite de Kief était mort et, par suite de rivalités qui mettaient en présence deux prétendans à sa succession, le siège était vacant. La nomination appartenait hiérarchiquement à l’empereur grec. D’accord avec le patriarche de Constantinople, il nomma Isidore. Les sympathies du nouvel élu pour l’Église de Rome n’étant pas douteuses, le Saint-Siège ne pouvait que se réjouir de voir le choix de l’Empereur se porter sur un homme dont les opinions et les intentions, déjà manifestées au concile de Bâle, devaient