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rechercher et de relever les mines ; en haute mer, il est difficile de repérer celles que dans l’ardeur de la lutte ou la précipitation de la fuite on abandonne et dont le secret, connu du navire qui les pose, peut, dans le combat, périr avec lui. Vainement la Grande-Bretagne cherche-t-elle à restreindre aux mines flottantes, munies d’appareils qui les rendent inoffensives au bout d’une heure, l’usage de la haute mer, l’Allemagne prétend poser des mines, même amarrées ; mines qu’il est facile d’immerger dans les mers peu profondes, — Baltique, mer du Nord, Manche, Méditerranée, — sans autre obligation que de signaler la région dangereuse aussitôt le contrôle perdu. Ainsi, ce n’est pas l’Angleterre, c’est l’Allemagne qui risque de devenir, en temps de guerre, la meurtrière maîtresse de la mer. Et quand, le 17 septembre, sir E. Satow signale les conséquences inhumaines de ce système, qui ne tend à rien moins qu’à semer à profusion des mines dans toutes les mers, le baron Marschall réplique, en un des plus impressionnans momens de la Conférence, que l’Allemagne n’a de personne à recevoir des leçons d’humanité.

Les délégués britanniques avaient dit (et l’allusion était claire) que « la perte d’un de ses grands paquebots en temps de paix éveillerait les instincts belliqueux d’un grand peuple. » « Personne, répond le baron Marschall, n’aura recours à ce moyen sans raisons militaires absolument urgentes. Or les actes militaires ne sont pas régis uniquement par les stipulations du droit international : il y a d’autres facteurs. La conscience, le bon sens et le sentiment du devoir imposés à l’humanité seront les guides les plus sûrs. Nos officiers, je le dis hautement, rempliront toujours de la manière la plus stricte les devoirs qui découlent de la loi non écrite de l’humanité et de la civilisation. » C’est à la conscience de ses officiers que l’Allemagne confie le soin de limiter la pose des mines : pouvoir redoutable et négateur du droit des gens. Tout ce que l’Allemagne admet, c’est que les mines soient disposées de manière à devenir inoffensives, dans le délai d’une heure pour les mines flottantes, et, pour les mines fixes, dès la rupture de l’amarre. Mais la convention qui, péniblement, s’élabore sur cette base, ne limite les mines que dans leur nature et dans le temps, non dans l’espace. Tout au plus tente-t-elle de les restreindre dans leur but en défendant de s’en servir contre les côtes et les ports de l’adversaire à seule fin d’intercepter le