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ne réussiriez pas, croyez-vous que je vous aimerais un grain de moins ! Et supposons un moment que vous soyez sûr de ne pas faire ce que vous voulez et que vos scrupules de délicatesse restent toujours, qu’est-ce que nous ferions ? Exactement la même chose qu’à présent, nous tracassant l’esprit perpétuellement pour être ensemble, bisquant quand il y a un tiers, tremblant quand le beau temps viendrait au lieu de nous réjouir, parce qu’il peut nous séparer, et passant le reste de notre vie à nous attrister et à nous contraindre. Ou supposons que nous agissions si prudemment que personne ne jase sur nous, cet été, et que j’amène maman en Italie et que nous revenions. Nous avons encore l’hiver prochain à passer comme celui-ci, vous perpétuellement dérangé, le matin, pendant que vous travaillez, dérobant quelques heures pour moi, rentrant triste chez vous. Mon cher ange, je ne puis souffrir que vous soyez triste ! C’est cette idée de la vie que vous menez qui me donne le courage de sortir de ma place et de vous dire tout ceci. Il vous faudra au moins tout l’hiver pour ce que vous voulez faire, au moins. Le printemps venu, maman voudra pour sûr aller en Angleterre, et je n’y opposerai pas une objection, pour rien au monde, ce serait trop injuste. Nous en serons exactement au point où nous en sommes, avec une année de plus sur notre tête dont nous aurons passé une bonne moitié à nous chagriner. Il vous faudra la moitié de l’été pour publier, corriger des épreuves, et pendant tout ce temps-là, le même scrupule de délicatesse durera et je ne serai pas avec vous. Quand on est heureux, il n’y a rien de si aisé que d’attendre le succès un an ou deux. Qu’est-ce que c’est dans la vie ? Mais quand, pendant deux ans, on est perpétuellement triste et inquiet, cela en paraît dix, et l’effort pour les supporter coûte toute l’énergie qu’on dépenserait à conquérir. Notez que tout ce dernier cas suppose que tout est dans son plus beau et se passe comme nous le pouvons le plus le désirer. Et ces scrupules, que de choses je pourrais dire pour démontrer je ne dis pas seulement leur fausseté, mais leur cruauté I A présent que l’effort est fait, je puis parler ; mais depuis deux mois, que de larmes j’ai versées, ne pouvant imaginer quel était ce lien dont vous parliez, imaginant les choses les plus étranges jusqu’à croire que vous étiez marié, mais si malheureusement que depuis des années vous étiez venu à bout d’en détourner vos pensées ; ou bien jusqu’à croire que vous ne