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l’ennemi, auraient risqué de ne plus pouvoir se dégager. Au contraire, en janvier 1871, le XIVe corps allemand s’établissant en défensive le long de la Lisaine, au Sud de Belfort, dispose à plusieurs kilomètres en avant de son front et de ses ailes des détachemens de toutes armes, avec mission non seulement de couvrir, mais aussi de renseigner et de prendre contact. Voici un organe nouveau dont la conception jadis eût été une véritable folie. Les détachemens de contact n’étaient possibles qu’avec des armes capables de tenir l’ennemi à distance ; cependant ils ne pouvaient encore que faire gagner du temps à la défense. Leur emploi a pour conséquence de rendre plus pénibles à l’assaillant les prises de contact que la défense a donc intérêt à multiplier, en manœuvrant en profondeur. La durée de l’engagement général (combat de préparation de notre règlement) s’accroît. Le vaincu se soustrait de plus en plus facilement à l’étreinte du vainqueur. Nous avons constaté plus haut ces mêmes phénomènes, moins accusés, en comparant le combat antique à la bataille napoléonienne.


Nous voici à la deuxième grande étape parcourue depuis les armes lisses : l’avènement de la poudre sans fumée et du shrapnel fusant dont les effets sont foudroyans jusqu’aux plus grandes distances sur des troupes découvertes. En même temps, le fusil a augmenté sa portée, sa vitesse de tir et son invisibilité.

Ces modifications entraînent les mêmes conséquences que les progrès antérieurs. Plus l’artillerie a de puissance, plus il importe d’avoir immédiatement la supériorité du feu sans laquelle on court bien des risques. Dès lors, plus que jamais, il faut pousser l’artillerie vers les têtes de colonnes et la déployer promptement. On peut le faire d’autant mieux que le fusil perfectionné permet à une infanterie moins nombreuse de protéger un plus grand nombre de batteries. Les Japonais n’ont pas manqué d’agir de la sorte.

L’efficacité plus grande et plus rapide des armes et surtout l’absence de fumée vont donner, aux détachemens de contact, ce nouvel organe de la défense, une importance croissante, car les difficultés de l’exploration augmentent dans une proportion inouïe. L’assaillant, comme le défenseur, est forcé de se couvrir au loin par des détachemens mixtes. Dès lors, il n’y a plus de