de politique avec M. V….[1], une fée bienfaisante voulait lui faire apparaître un instant l’état de mon âme, il viendrait. Mon Dieu, si je pouvais une seule fois lui dire : « Cher Cousin, ne soyez pas si froid et si sec pour moi, cela me fait souffrir, soyons amis comme vous le vouliez. D’abord, je ne demande qu’à vous revoir tel que je vous ai vu. » Oh ! que j’ai été folle de gâter ce. que j’ai possédé quelquefois ! Je pense que c’est un rêve. Est-ce bien moi qu’il a aimée ? Il dit que ce n’était que de l’amitié. Eh bien ! s’il pouvait m’aimer encore comme cela, je serais satisfaite. Mon Dieu ! je m’enivre de larmes, il me semble que tout mon être va fondre.
Il faut se gouverner. Ce matin, je regardais à distance et comme à l’affût sa conduite et la mienne : il n’a jamais voulu avoir pour moi de la passion. (Mais il m’a aimée, j’en suis sûre, Auguste Vignier l’a dit. Oh ! que je l’aime de l’avoir dit !) Il a vu que je n’avais pas la force de l’aimer comme il voulait et il a tout tranché ; il a cru que c’était son devoir, et moi, malheureuse, j’en suis la cause. Sans cette exécrable lettre écrite il y a à présent un mois, je l’aurais encore comme alors. Je ne puis dire l’état dans lequel cette idée me met. Je me roule de douleur, je ne puis que dire tout bas : « Ah ! mon Dieu, ayez pitié de moi, ayez pitié de moi ! » Ah ! pourquoi la douleur ne me tue-t-elle pas, et je l’aimerais[2].
(A suivre.)
- ↑ Probablement Vitet.
- ↑ Au printemps de 1826, Mary Clarke reprend, comme chaque année, le chemin de Cold Overton ; et la correspondance recommence à peu près sur le même ton. Les lettres de Fauriel semblent plutôt plus affectueuses. Le nom de Cousin y revient quelquefois. Il n’a pas de rancune contre ce rival passager, bien qu’il reste un peu endolori de sa mésaventure. Le 28 juin, il écrit à Mary : « Pourquoi ne me dites-vous rien de C[ousin] ? Je l’ai vu assez souvent depuis quelques jours, et nous avons diné plusieurs fois seuls, et recommencé à causer avec un peu plus d’intimité qu’il y a quelques mois. Il n’y a, je crois, dans mon cœur, aucun mauvais sentiment à son sujet ; il y a même des momens où je serais enclin à m’accuser d’avoir manqué de générosité envers lui : cependant, j’ai beau faire ; il y a eu en moi quelque chose de froissé qui ne revient pas, qui ne reviendra pas, et que je regretterai toujours. Il m’a demandé de mes nouvelles ; je lui en ai donné, et tout a fini par quelques mots que je ne me suis pas senti disposé à allonger. »
Plus apaisées encore, les lettres de Mary se rouvrent cependant aux reproches habituels : car Fauriel se montre comme toujours un correspondant trop peu empressé à son gré, encore qu’il le soit plus que pendant le voyage d’Italie. En somme, c’est une période d’accalmie : le passage de Cousin a ramené la paix pour quelque temps.