Page:Revue des Deux Mondes - 1909 - tome 49.djvu/393

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

aux pauvres paysans et contraires au véritable esprit de Dieu.

Ce qui manquait le plus en 1639 pour le succès d’un tel apostolat, c’était un clergé sérieux. Pour le former, Pavillon ne ménagea ni ses soins, ni sa peine. Après s’être enquis à fond, par un premier synode tenu en 1640, de la médiocrité religieuse de la plupart de ses subordonnés, il avait distribué son diocèse en sept cantons, et ordonné que, dans chacun d’eux, les prêtres, soit sous sa présidence, soit sous la présidence de son archiprêtre ou de son théologal, tiendraient tous les mois une conférence de deux heures. Les matières qui devaient s’y traiter étaient fort simples : les principaux mystères, les sacremens, les prières du matin et du soir, les commandemens de Dieu et de l’Eglise ; car la religion de Pavillon n’est pas compliquée à plaisir ; elle est toute simple comme sa foi. Ce sont les mêmes sentimens de piété éclairée et intelligente qui l’inspireront dans la création de ce séminaire d’Alet, qu’il devait considérer comme une des œuvres essentielles de sa vie épiscopale. Aucune ne l’attacha davantage. Il n’y avait pas à Alet de maison convenable pour l’établissement du séminaire. Il commença par loger ses séminaristes chez quelques ecclésiastiques et chez le maître d’école du village. Mais, ne pouvant garder tous les jeunes gens qui se présentèrent bientôt pour recevoir de lui l’éducation et la direction religieuses, il imagina une sorte de roulement aussi avantageux pour eux que pour les paroisses du diocèse, qui manquaient totalement d’instituteurs. Il fixa à trente le nombre de ses séminaristes, et décida que les curés lui enverraient à Alet les jeunes gens de leurs paroisses respectives à qui ils remarqueraient de l’inclination pour l’état ecclésiastique. Ces jeunes hommes, âgés de dix-huit à dix-neuf ans, passaient, à tour de rôle, quelque temps au séminaire. On les affermissait dans la piété, et on leur enseignait très simplement à faire l’école à des enfans. Puis, on les renvoyait dans les diverses paroisses du diocèse, où, sous le nom de régens, ils faisaient des maîtres selon le cœur de Pavillon. Enfin, lorsque l’évêque s’était assuré ainsi de la sincérité de leur vocation, en les mêlant comme régens à la vie des pauvres gens des campagnes, il les reprenait deux années au séminaire où il les préparait à recevoir les ordres. Il fournissait lui-même aux dépenses et à l’entretien de la maison. ainsi qu’en font foi les lettres patentes de Louis XIV, en 1670, « portant confirmation du séminaire d’Alet. »