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concurrence honorable, à cette rivalité émouvante qui a ait jeté les deux pays, face à face, sur les mêmes voies.

La France et l’Angleterre, qui se heurtèrent à cette heure, avaient usé, au cours des longues et complexes négociations antérieures, de ménagemens réciproques et s’étaient abordées dans des sentimens de conciliation et d’estime. Ce corps à corps unique avait été précédé de vingt ententes. On n’avait jamais perdu de vue la considération dominante de l’harmonie nécessaire entre les deux puissances et de la collaboration finale aux mêmes œuvres.

Un jour viendra où la nécessité de cette collaboration, non seulement partout dans le monde, mais spécialement dans les régions sur lesquelles portait le litige, apparaîtra. Ce ne sera pas trop du concours de toutes les puissances limitrophes pour pénétrer ces immenses et farouches provinces. On verra bien que la communauté des efforts est préférable à des revendications exclusives et hostiles. Au sein de ces marécages où les eaux indécises des deux plus grands fleuves africains hésitent avant de séparer leurs cours, les politiques qui furent rivales se rapprocheront et se retrouveront unies. L’avenir, repassant alors l’œuvre interrompue, reconnaîtra que la vigilance française, portée jusqu’à ces confins éloignés, était justifiée. Si l’esprit de concorde et la bonne grâce l’eussent emporté, — et peu s’en fallut, — les résultats eussent été meilleurs pour tous, sans les risques d’une rupture redoutable et la douleur d’une blessure cuisante. Entre vieilles nations et camarades de route dans l’histoire, les égards mutuels sont le plus sage : on se retrouve.

Quoi qu’il en soit, pour que l’avenir sache et que l’histoire juge, il faut qu’ils soient éclairés et que, les brouillards de la polémique étant dissipés, la vérité se lève.

L’exposé qui va suivre a pour objet démettre, une fois pour toutes, hors de cause l’honneur de la France et la bonne foi de ceux qui l’ont représentée. Il est consacré, uniquement, au débat diplomatique qui, remontant aux années antérieures, s’est terminé par le rappel de la mission Marchand.

Quant à l’expédition elle-même, je n’entreprends pas de la raconter : le plus simple et le plus fort des témoignages, c’est le journal de marche écrit, au jour le jour, par les chefs. Ils ont fait, pour le pays, tout ce qui pouvait être fait. Leur étonnante randonnée achève superbement la série de ces