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En fait, si les pourparlers avaient été suspendus, ils n’avaient jamais été interrompus complètement. L’énergique volonté de ne pas laisser « couper le fil » trouva, dans la cordialité des relations publiques et personnelles, une nouvelle ressource. Puisque la méthode par tractation d’ensemble et par recherche, d’une entente générale avait échoué, le Cabinet de Paris en essaya une nouvelle ; il proposa au Foreign Office de procéder par étapes et de chercher l’entente finale par la voie des accords particuliers.


III

Jamais, peut-être, l’attention de la France pour la défense de sa situation dans le monde ne fut attirée de plus de côtés à la fois. L’année 1895 est encombrée d’événemens graves : après l’assassinat du président Carnot, le procès du capitaine Dreyfus, la démission de M. Casimir-Perier, la mort d’Alexandre III, la guerre sino-japonaise, l’inauguration du canal de Kiel, la proclamation de l’alliance franco-russe.

C’était l’heure où cette difficile campagne de Madagascar tendait, à l’excès, les nerfs du pays. Pendant toute l’année 1895, l’opinion publique fut suspendue au sort de l’expédition. L’Afrique n’était qu’un immense lieu de conflits. Au Sénégal et dans le Niger, une campagne des plus pénibles se poursuivait contre Samory. Le problème de la navigation du Niger était l’objet de contestations très aigres entre la France et l’Angleterre.

Le groupe colonial français avait pris conscience de ses forces ; sous la direction d’hommes comme M. Etienne et le prince d’Arenberg, il remuait l’opinion et stimulait sans cesse l’activité du gouvernement. Un organe important de l’expansion coloniale, dont l’action devait être considérable, le Comité de l’Afrique française, soutenait et groupait l’ardeur des pionniers qui se consacraient au continent noir. Les vues de ce groupe, qui comptait de nombreux appuis au parlement et dans la presse, étaient exprimées, dès les premiers jours de l’année 1895, par un article qui eut du retentissement : « Il ne reste plus qu’un moyen de prévenir un nouvel envahissement aggravant encore la situation de fait qui existe en Egypte et de sauvegarder à la fois notre dignité et les droits de la Porte, c’est de prendre