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officiellement, à leurs collègues anglais que la France ne croyait pas devoir s’en tenir à des arrangemens particuliers et qu’elle se proposait d’élargir, par des propositions formelles, les bases de l’accord, si eut accord était possible. Ils demandaient que la négociation portât, non seulement sur la rive droite, mais sur la rive gauche du Niger. Ils demandaient aussi que les rives Nord et Est du lac Tchad fussent attribuées à la France : moyennant quoi, ils étaient autorisés à reconnaître la ligne Say à Barroua et à faire des concessions sur la navigation du fleuve.

Par cette proposition, la France jouait cartes sur table et mettait ses partenaires au pied du mur. En accédant à la ligne Say-Barroua, sauf certaines modifications indispensables, et en renonçant aux embouchures du Niger, sauf les enclaves nécessaires pour assurer la liberté de navigation, elle désarmait son plus redoutable adversaire, la Compagnie du Niger. Mais, en réclamant les rives du lac Tchad et les territoires environnans, elle donnait à la négociation toute son ampleur ; elle en faisait une œuvre d’équilibre africain ; par ce déploiement inopiné vers l’Est, elle posait indirectement la question Marchand.

Qu’une telle initiative ait été ainsi comprise à Londres, cela ne peut être mis en doute : car, le 29 novembre, sir Edmund Monson déclarait au ministre des Affaires étrangères « que la conférence n’avait pas à s’occuper de la rive gauche du Niger, mais bien de la rive droite ; qu’il n’y avait aucune corrélation à établir entre deux questions si différentes ; que toutes les questions relatives à la rive gauche du Niger étaient réglées par l’arrangement de 1890. » Quant aux territoires situés à l’Est du lac Tchad, le gouvernement anglais, inquiet des revendications qui se trouvaient consignées, pour la première fois, dans un document officiel, indiquait qu’il y avait lieu de les régler de façon à prévenir toute expansion démesurée dans la direction du Nil.

Cette manière de voir fut encore précisée, mais dans des termes heureusement plus favorables, par une lettre de sir Edmund Monson, datée du 10 décembre : « Les bases proposées n’avancent pas beaucoup les négociations, étant donné que les questions les plus contestées ne sont pas touchées… Quant à la proposition de reconnaissance des droits de la France sur les rives Nord et Est du lac Tchad, si les autres questions sont réglées, le gouvernement de Sa Majesté ne fera pas de difficultés pour cette condition. Mais, ce faisant, il ne peut oublier que la