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où il venait souvent en villégiature d’été ; si les États-Unis voulaient reprendre avec Ottawa d’anciennes conversations, on est prêt à leur faire un accueil amical, mais ce sera tout.

Une autre négociation, en revanche, qui pourrait mieux réussir cette fois que jadis, tendrait à réunir Terre-Neuve au Dominion du Canada. La grande île, qui a son Parlement spécial, et dont les dirigeans avaient jusqu’ici lié partie avec des négocians américains, vient, elle aussi, de renouveler sa représentation législative ; le ministère de sir Robert Bond, s’il n’a pas été mis expressément en minorité, est si profondément ébranlé que des changemens de personnes sont inévitables ; après dix ans de magistrature ininterrompue, sir Robert était usé ; son successeur, sir Edward Morris, avait été formé à ses côtés, nous allions dire à son ombre ; il s’est émancipé à un moment où, toute menace de conflit avec la France écartée, par la liquidation complète de nos droits sur l’ancien French Shore, il devient possible de mettre librement en valeur cette côte occidentale de l’île, qui fait face au Saint-Laurent ; la solidarité d’intérêts entre les deux domaines britanniques voisins ressortira mieux, maintenant que l’activité de Terre-Neuve, bien équilibrée, dépendra moins de ses relations avec les États-Unis ; peut-être est-il réservé à sir Wilfrid de réaliser, de ce côté, le « greater Dominion. »


En Europe, si l’on met à part l’Angleterre, deux puissances seulement intéressent présentement le Canada : l’Allemagne et la France. Avec l’Allemagne, le ton des rapports économiques actuels est, officiellement, celui de l’hostilité déclarée. Lorsqu’en 1897 MM. Laurier et Fielding, ce dernier ministre des Finances, voulurent instituer la Préférence pour l’Angleterre, quelques voix s’élevèrent, en Allemagne, pour réclamer le bénéfice des mêmes réductions ; la clause de la nation la plus favorisée étant inscrite dans un traité passé entre l’Allemagne et l’Angleterre (1865), toute concession dont l’Angleterre profitait devait, d’après ces plaignans, profiter du même coup à l’Allemagne. À cette prétention, qui méconnaissait le droit d’une métropole de déterminer un régime purement domestique entre elle et ses colonies, l’Angleterre répondit par la dénonciation du traité qui la liait à l’Allemagne. Un traité anglo-belge, pour la même raison, eut le même sort. Dès lors, le Canada fit librement jouer la Préférence, mais, l’Allemagne s’obstinant dans sa