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principalement se montrent en pleine lumière les convictions germanistes exclusives qui avaient conquis la pensée de l’auteur et devaient In dominer sans partage pendant les brèves années qui lui restaient à vivre. Ces audaces théoriques, bien qu’elles ne fussent pas sa création propre et qu’il les appuyât d’autorités nombreuses, firent refuser le prix Krupp au docteur Woltmann, dont le mémoire ne fut classé par le jury que le troisième. Il semble que les travaux préférés au sien ne le valaient point, mais n’est-ce pas là le résultat presque inévitable d’un concours public où l’œuvre inégale et hardie succombe devant les travaux sages, réguliers et moyens ? Peu psychologue, Woltmann eut la naïveté de s’en étonner et la faiblesse de s’en fâcher. Bien qu’à peine à l’abri du besoin, il refusa la récompense pécuniaire, assez considérable encore, qui lui était attribuée, et ce premier geste était digne. Le second le fut un peu moins, car le candidat malheureux déchaîna dans la presse et surtout dans les pages de sa propre Revue un orage de récriminations passionnées. Son désappointement peu philosophique orienta même son activité intellectuelle pour tout le temps qui lui restait à vivre. Il se mit à l’œuvre afin de forcer l’adhésion scientifique de ses adversaires, afin d’établir par les méthodes de l’anthropologie scientifique que la race blonde a possédé, dans l’Europe moderne, le monopole du génie créateur.


IV

Inspiration regrettable à notre avis, car elle lui fit gaspiller presque en pure perte les courtes années que le destin lui réservait encore[1]. Tout ce qui était nécessaire à dire sur ce sujet l’avait été par M. H. S. Chamberlain, si tant est que ce penseur n’eût pas déjà largement dépassé la mesure. On lit dans les Assises du XIXe siècle[2] : « Une seule promenade au musée de Berlin, dans la galerie des bustes de la Renaissance, nous convaincra que le type des grands Italiens de ce temps est entièrement éteint de nos jours… C’est un naufrage complet qu’a subi, depuis le quattrocento, le Germanisme italien ! » Or,

  1. Ses travaux sur l’histoire de la sociologie impérialiste, semés çà et là dans sa Revue, sont bien autrement intéressans, à notre avis, que ses recherches sur l’origine des hommes de génie.
  2. 1re édition, p. 697.