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troubles éclatent à Hong-Kong et les boutiques japonaises sont pillées ; tout récemment, l’occupation par les Japonais, d’un îlot désert, aux confins de la Corée et de la Mandchourie provoque à Canton une nouvelle poussée de colère : aussitôt les affaires avec le Japon s’arrêtent ; les commandes sont annulées.

Ainsi la pratique du boycottage est entrée dans les mœurs des Chinois, elle s’y implante et tend à devenir chronique. Le boycottage a été la pierre de touche de la solidarité chinoise ; appliqué aux Américains, puis aux Japonais, il a manifesté et en même temps stimulé l’éveil du sentiment national dans l’Empire du Milieu. Le nationalisme chinois a ainsi donné un exemple qui aura des imitateurs ; il a enseigné l’usage d’une arme nouvelle qui tend à devenir par excellence l’instrument de lutte du nationalisme économique.


III

L’Europe qui, dans les temps anciens, a reçu de l’Orient asiatique le principe de sa civilisation et de sa vie morale, va-t-elle aujourd’hui retourner à son école ? On pourrait le croire en étudiant l’histoire du boycottage des marchandises autrichiennes dans l’Empire ottoman ; elle reproduit, presque trait pour trait, les incidens qui ont marqué, en Chine, le boycottage des produits américains et japonais ; nous y retrouverons la même cause initiale, les mêmes élémens d’organisation, de lutte et de succès : à l’origine, un abus de la force, un pays en pleine crise de transformation politique et sociale, des comités secrets et des corporations disciplinées, un sentiment national réveillé par l’aiguillon de l’étranger, par la propagande de quelques journaux et d’une élite d’hommes, un sens pratique très averti des contingences politiques joint à une étonnante débauche d’idées générales et de principes philosophiques, et, à la fin, le succès de larme nouvelle que l’organisation actuelle de la vie économique internationale a mise à la disposition des peuples. Lorsqu’il s’agit d’un mouvement populaire, les détails sont particulièrement caractéristiques : nous essaierons de relater les plus topiques.

Le 5 octobre 1908, l’empereur François-Joseph annonçait sa résolution d’annexer la Bosnie et l’Herzégovine ; la veille, le prince Ferdinand, s’était proclamé roi de la Bulgarie indépendante. Ainsi, deux provinces qui, théoriquement et en droit,