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républiques-sœurs se réveillait aussi ardente que la veille. Le but poursuivi : l’établissement d’une paix durable dans l’Amérique du Sud, presque continuellement troublée par des querelles intestines, semblait impossible à atteindre.

Les Etats-Unis n’avaient pris part à aucune de ces conférences. La proclamation de la célèbre doctrine de Monroe, qui déclarait les continens américains impropres à l’avenir à toute tentative de colonisation par les puissances européennes et leurs peuples libres de se donner le gouvernement qui leur agréerait, paraissait indiquer de leur part l’intention de s’engager dans une politique américaine. Il n’en fut rien ; soixante ans devaient s’écouler avant qu’ils prissent nettement position sur ce sujet. Jusqu’à l’abolition de l’esclavage, aucune entente n’était possible avec ces républiques qui avaient « proclamé les principes de liberté et d’égalité et marché à la victoire sous la bannière de l’émancipation universelle ; et qui avaient des hommes de couleur à la tête de leurs armées, dans leurs assemblées législatives, el dans leurs départemens exécutifs[1]. » Le Sud, toujours inquiet pour le sort de son « institution particulière, » désireux de rétablir sa prédominance chancelante dans l’Union, ne pensait qu’à acquérir des territoires nouveaux dans ces régions favorables à l’esclavage. Puis, au lendemain de la guerre de Sécession, une vaste entreprise s’était ouverte aux efforts des Américains : la mise en valeur de leurs riches territoires de l’Ouest, qui réclamait toutes leurs ressources et toute leur activité. Il n’était pas question, à cette époque, de politique extérieure. L’industrie américaine, malgré son rapide développement, ne suffisait pas aux besoins du marché national : dans le monde des affaires, nul ne se préoccupait de conquérir des débouchés au dehors.

Dès 1881, pourtant, un homme qui a joué un rôle considérable dans la politique des États-Unis, James G. Blaine, se faisait le champion d’une politique pan-américaine. Esprit brillant et original, ambitieux et confiant dans les destinées de son pays, Blaine, qui, par trois fois candidat du parti républicain à la présidence, ne devait pas atteindre ce but ardemment désiré, avait été choisi par le président Garfield comme secrétaire d’État. En acceptant ces fonctions, il avait un plan nettement arrêté : il entendait établir des relations actives entre les

  1. Hayne, de la Caroline du Sud, au Sénat, 1826.