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députés nommés sans le patronage de l’administration, la guerre n’en eût pas moins réuni une imposante majorité de suffrages. Il n’est donc pas permis de présenter la guerre de 1870 comme une entreprise arbitraire du despotisme imposée à la nation malgré elle. Ainsi que l’Empereur l’a souvent répété depuis, il a responsabilité de chacun doit se répartir en proportion égale : entre lui, ses ministres, le Parlement. « Si j’avais été contraire à la guerre, dit-il, j’aurais renvoyé mes ministres ; s’ils ne l’avaient pas crue nécessaire, ils auraient donné leur démission ; si le Parlement l’avait désapprouvée, il ne l’aurait pas votée. » Empereur, ministres, Parlement se sont décidés en toute liberté et en pleine connaissance de cause, aucun d’eux n’ayant été trompé, ni n’ayant trompé. Le vote des cinquante millions a tranché la question.

On vota successivement sans discussion un crédit de quinze millions pour la marine, la loi qui permettait de limiter les engagemens volontaires à la durée de la campagne et celle qui appelait à l’activité toute la garde nationale mobile. Cette séance, qui avait commencé le 15 à une heure de l’après-midi, fut levée aux premières minutes de la journée du 16.


VII

Au Sénat, Gramont n’avait pas trouvé les mêmes difficultés. La déclaration avait été accueillie par des bravos et des applaudissemens prolongés auxquels se mêlaient les cris de : « Vive la France ! vive l’Empereur ! » Les tribunes publiques s’étaient associées à l’enthousiasme de l’assemblée et l’avaient redoublé. Le président Rouher ayant dit : « Personne ne demande la parole ? — Non ! non, s’écria-t-on de toutes parts ; vive l’Empereur ! » Rouher reprit : « Le Sénat, par ses bravos enthousiastes, a donné sa haute approbation à la conduite du gouvernement. Je propose au Sénat de lever la séance comme témoignage d’ardente sympathie pour les résolutions prises par l’Empereur. » Les cris de : « Vive l’Empereur ! » éclatèrent et la séance fut levée. A la sortie, les sénateurs, devenus populaires pour la première fois, furent acclamés par la foule.

Le lendemain, la Commission du Sénat se réunit. Gramont y fut appelé. Il plaça sous les yeux des commissaires les dépêches qu’il avait fait connaître la veille au Corps législatif ; il