Le vent file ce soir, sous un mol ciel d’airain,
Comme un voilier sur l’Atlantique.
On entend s’éveiller le Printemps souverain,
À la fois plaintif et bachique :
Un infini parfum, puissant, traînant et las
Triomphe et pourtant se lamente.
Le saule a de soyeux bourgeons de chinchilla
Épars sur la plaine dormante.
Un bouleversement hardi, calme et serein
À rompu et soumis l’espace ;
Les messages des bois et l’effluve marin
S’accostent dans le vent qui passe !
Comment s’est-il si vite engouffré dans les bois,
Ce dieu des sèves véhémentes ?
Tout encore est si sec, si nu, si mort de froid !
— C’est l’invisible qui fermente !
Là-bas, comme un orage aigu, accumulé,
La flèche de la cathédrale
Ajoute le fardeau de son sapin ailé
À ce ciel qui défaille et râle.