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début du XVIIIe siècle. Déjà ne croit-on pas voir courir sur le papier la plume de Figaro ?

Ils ont presque l’oreille du secrétaire d’Etat aux Affaires étrangères, jusqu’au 28 octobre 1706 tout au moins, où l’un d’eux écrit : « Plus de nouvelles, madame, les canaux en viennent d’être coupés par ordre de M. de Torcy, qui a fait arrêter trente commis qui se donnaient le soin de les répandre dans le public, malgré les défenses expresses qu’il leur en avait faites novissime. » Oui, novissime, — du latin, non de cuisine, mais d’antichambre.

Le chevalier d’Aydie, qui est à Mayac, écrit à la marquise du Deffand, le 29 décembre 1753 : « Le brave Julien m’a totalement abandonné. » Et pourquoi le brave Julien a-t-il abandonné le chevalier ? « Les ministres lui ont fait défendre d’écrire des nouvelles. » Julien rédigeait sans doute un journal d’opposition ; le gouvernement en a pris ombrage. « Mais Julien m’avait promis de me mander les nouvelles qui regardaient la santé de Mme du Châtelet, écrit le chevalier ; les ministres ne peuvent s’opposer à cela. »

Que souhaiteraient de plus nos gazetiers en mandille ? — Ils font peur au gouvernement !


II. — LES CHASSEURS DE NOUVELLES

De Paris, le 6 janvier 1721, le marquis de Balleroy mandait à sa femme : « Je viens d’arrêter un nouvelliste dont on m’assure que vous serez contente. »

Les parens, les amis, les relations, auxquels on en arrive à adjoindre les serviteurs, ne suffisent pas : on s’adresse à des spécialistes, de qui l’on sera en droit d’exiger, moyennant une rétribution précise, la ponctualité et l’exactitude. Les personnes de qualité auront ainsi leur informateur, chargé de recueillir et de transmettre les échos du jour, personnage qui fera partie de leur « domestique, » comme leur suisse et leur maître d’hôtel.

Un compte manuscrit de recettes et dépenses du duc de Mazarin porte cet article :

« Au sieur Portai, pour les nouvelles qu’il fournit toutes es semaines par ordre de Monseigneur, et pour cinq mois, à 10 livres par mois... 50 lb. »

Outre ces appointemens fixes, le chasseur de nouvelles avait droit de prendre place à la table de l’oilice, quand le hasard de