Page:Revue des Deux Mondes - 1909 - tome 52.djvu/350

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

de l’autorité de l’Empereur pendant le moyen âge. Avant la fin du VIIIe siècle, le gouvernement avait été déjà modifié sur le modèle de celui de la Chine, avec un système régulier de ministres responsables vis-à-vis du souverain qui, fils du Ciel, conservait le pouvoir absolu. Pratiquement, cet absolutisme était plus nominal que réel. Le régime du Japon était exclusivement féodal. Il ne pouvait en être autrement, puisque la féodalité est la forme sociale des organisations primitives et résulte de l’anarchie des groupemens initiaux. Les seigneurs féodaux, nommés daïmyos, véritables chefs de clans, ne pouvaient assurer la sécurité de leurs possessions que par leur vigueur personnelle et celle de leurs hommes d’armes, les « Samuraïs ; » de même que nos barons du moyen âge, ils étaient constamment en guerre. Certaines familles prirent par les armes une influence prépondérante. C’est ainsi que la famille Fujiwara put diriger les affaires de l’État depuis 670 jusqu’en 1050. Ses membres tenaient les principaux emplois du gouvernement, et ses filles étaient données pour femmes aux empereurs.

Mais les daïmyos tenus à l’écart se soulevaient. Des luttes incessantes se produisaient. Elles eurent pour conséquence l’essor de deux grandes factions, les Taïra et les Minamoto qui s’arrachèrent les rênes du gouvernement pendant la seconde moitié du XIe siècle et la totalité du XIIe . Le Japon n’était plus qu’un vaste champ clos, et le véritable maître de l’Empire était le chef qui avec l’armée la plus puissante pouvait distribuer le pays conquis à ses fidèles. La destruction finale des Taïra en 1185, rendit Yoritomo, chef des Minamoto, maître du pouvoir. L’Empereur lui donna le titre de Shogun, que ses successeurs continuèrent à porter. Le shogunat fut successivement occupé par de puissantes familles, chez lesquelles cette charge était devenue héréditaire. Ainsi les Ashikaga restèrent au pouvoir de 1338 jusqu’à la fin du XVIe siècle. En 1592, le shogun Hideyoshi soumit les daïmyos récalcitrans et envahit la Corée. Il méditait la conquête de la Chine quand il mourut en 1598. Tokugawa-Iyéasu, puissant daïmyo, chassant de son palais le fils d’Hideyoshi, battit tous les daïmyos turbulens, et distribua une grande partie de leurs biens à ses alliés et à ses hommes d’armes[1]. Par des attributions judicieuses de différens fiefs de l’Empire aux deux grandes

  1. Things Japanese, by Basil Hall Chamberlain. London, 1905.