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navales ne sont pas toujours d’accord. Le célèbre « point de soudure » reste encore souvent d’une fixation incertaine. Mais il arrive que l’on s’entende, entre ingénieurs et artilleurs, sans que l’officier de marine, celui qui aura la lourde tâche de combattre avec les engins qu’on lui prépare, soit consulté ou seulement averti. Heureusement que nous y veillons de près : Vouillé et son maître canonnier circulent partout, vont des tourelles aux casemates, des soutes aux monte-charges, du blockhaus au poste central, et ils ne laissent rien passer de défectueux que le commandant n’en soit prévenu. Mais c’est peu de chose que ces questions de détail à côté de certains graves problèmes qui ne sont pas près d’être résolus : la réfrigération des soutes à poudre voisines des chaufferies, la création de postes de visée pour les chefs des casemates, l’organisation des communications entre le blockhaus, poste de combat du commandant, et les pièces principales, toutes isolées les unes des autres.

14 août. — Un numéro de l’Emancipation, est tombé sous mes yeux. C’est le journal du syndicat. En première page, de vives critiques sur le rapport du budget. M. M*** est soupçonné de tiédeur à l’endroit des « travailleurs » de l’arsenal, et il a le tort de préconiser la spécialisation de Toulon pour les réparations et les refontes, puisque aussi bien la construction neuve y est si lente. Les argumens que lui oppose la feuille syndicale, sans être décisifs, certes, sont relativement raisonnables. Les choses se gâtent à la troisième page : voici une extravagante élucubration où l’on prêche, — avec les pires injures aux officiers, — la paix à tout prix, le désarmement général, la suppression des armées permanentes et des flottes de guerre. Eh bien ? alors, avec quoi vivront nos 30 000 « travailleurs ? » Pensent-ils qu’on leur partagera tous les ans les 300 millions du budget de la Marine ?... Je connaissais l’ignorance, la naïveté de ces pauvres gens, mais ceci passe l’entendement...

21 août. — J’apprends que les travaux ont été à peu près interrompus ici pendant une année parce que les crédits affectés aux constructions neuves du port de Toulon étaient exclusivement employés à hâter l’achèvement d’un grand croiseur cuirassé, l’Héroïne, et d’une demi-douzaine de « destroyers. » Or le ministre n’en savait rien ; il pensait avoir suffisamment doté le