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que les Russes de la poussée des Allemands sur Varsovie, et ils se rappellent les études diplomatiques où Klaczko[1] établissait que, lors de la dernière insurrection, Bismarck avait évoqué la possibilité de laisser chasser les Russes de Varsovie pour y entrer ensuite, promettant que « au bout de trois ans tout serait germanisé. » C’est seulement depuis 1909 qu’un revirement dont il faut bien parler aussi s’est produit chez un grand nombre ; dans la déception de voir que le gouvernement ne desserrait point l’étreinte, et nous avons entendu récemment un des plus importans écrivains polonais déclarer qu’il préférerait voir Varsovie tomber sous la tyrannie plus civilisée de Berlin. L’économiste W. Studnicki insiste sur le danger qu’il y a pour la mentalité polonaise à rétrograder vers l’Orient sous un régime qui supprime l’instruction et n’accorde aucune législation régulière ; il signale surtout l’influence déplorable des littérateurs anarchistes russes beaucoup trop lus dans les lycées de Pologne. Autant vaut, se dit-on enfin, être gouverné par Berlin et directement, puisque l’autorité de la police russe s’aggrave encore des inspirations de la Wilhelmstrasse. En juillet 1909, on commente en ce sens dans la capitale les propos tenus par Guillaume II dans sa récente entrevue avec le Tsar sur le yacht Standart : il aurait par deux fois exposé son opinion sur les Polonais, félicitant M. Stolypine de sa politique intérieure touchant « cette population agressive avec qui il faut agir très sévèrement, » et revenant au dîner sur la nécessité de « ne s’approcher jamais des Polonais sans rien avoir en mains, mais toujours muni d’un bâton, sans quoi on serait exposé à être piqué par leurs aiguillons hérissés. »


VII. — LA POLITIQUE GERMANOPHILE ET LA POLITIQUE NATIONALE A PÉTERSBOURG

Un observateur aussi impartial que M. A. Leroy-Beaulieu déclare qu’on a peine « à s’expliquer la politique russe en Pologne autrement que par le désir d’être agréable à Berlin. » M. Maximo Kowalewsky n’hésite point à dire : « La politique antipolonaise

  1. Voyez les remarquables études de Julian Klaczko publiées dans la Revue de 1860 à 1880.