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contre l’affaire de Chelm. Après que le Tchèque Klofatsch eut signalé la défaite de la Russie dans l’affaire des Balkans et établi qu’elle était mal armée contre le Drang, M. Kramarz constata qu’à Pétersbourg on n’avait rien entrepris depuis le congrès de Prague dans le sens de l’entente et expliqua que c’était pour cette raison que les Slaves d’Autriche n’avaient pas fait opposition au gouvernement au sujet de la Bosnie. Le député russe Lwof déplora l’attitude du gouvernement ; MM. Maxime Kowalewsky, représentant de la culture russe, Fedorof, Milioukof, Pogodine, Bodiczef parlèrent contre le panslavisme qui ne saurait plus être un vrai slavisme et soutinrent que les néo-slavistes, malgré « la trahison » de Chelm, étaient en majorité. Tous furent d’accord qu’il dépendait de la Russie que le néo-slavisme se fît pour elle. On fixa en Bulgarie le prochain congrès. La conférence fut franchement loyaliste envers le tsarisme et antibureaucratique[1].

Il est clair que la division en Russie sur la question de Pologne se fait et s’accentue entre la bureaucratie et la représentation nationale. La bureaucratie, composée en grande partie d’Allemands, maintient à Varsovie l’état de siège sous le nom de défense renforcée et persécute les conservateurs nationaux-démocrates au moment même où ils luttent vigoureusement contre l’anarchie ; les membres influens des divers partis de la Douma s’irritent contre l’ingérence de la Wilhelmstrasse dans les affaires intérieures de l’Empire. « Nous ne pouvons annoncer en Pologne l’accomplissement des réformes indispensables sans voir aussitôt l’Allemagne intervenir, » se sont écriés MM. Maklakof et Milioukof. « Affaiblir l’élément polonais en Pologne, c’est faire le jeu du germanisme. Le fortifier au contraire, c’est élever contre le germanisme un boulevard nécessaire. La Nation et la Douma l’ont compris. » Quelques jours après l’acquiescement de la Russie à l’annexion de la Bosnie, le comte Bobrinsky, leader de la droite modérée, est monté à la tribune pour dénoncer le péril allemand en Pologne, parlant de l’Allemagne comme d’un Etat hostile. Le prince Volkonsky, vice-président de l’assemblée, et plusieurs de ses membres ont décliné l’invitation de l’ambassadeur d’Allemagne à une soirée.

  1. Des Têtes tchéco-polonaises furent ensuite organisées par M. de Zwan et le prince Lubomirski à Varsovie ; dans un grand enthousiasme populaire elles ont resserré les liens politiques des deux nationalités autrefois hostiles.