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le cas à Saint-Riquier, où, dès le milieu du IXe siècle, on relève une rue des Marchands en gros, une rue des Forgerons, une rue des Armuriers, une rue des Selliers, une rue des Boulangers, une rue des Cordonniers, une rue des Boucliers, une rue des Foulons ; et à Sithieu, où Foulques, abbé de Saint-Bertin, en 881, distribue la population ouvrière par métiers[1]. C’est le cas à Verdun, où le quartier des marchands, muré comme une forteresse, est séparé par la Meuse de la cité, à laquelle le relient deux ponts[2]. C’est le cas également à Paris, dans ce Paris du XIIIe ou du XIVe siècle, dont il n’est pas impossible et dont il serait amusant de reconstituer le tableau. « L’activité industrielle et commerciale se déployait surtout sur la rive droite de la Seine qu’on appelait le quartier d’Outre Grand Pont. Les artisans de même profession étaient fréquemment groupés dans le même quartier. Le nom seul de certaines rues prouverait qu’elles étaient, à l’origine du moins, le siège d’une industrie spéciale[3]. « En la rue de la Mortèlerie, devers Saine, » on fait les mortiers. La population de la Tannerie se composait en majorité de tanneurs. Les selliers, les lormiers et les peintres étaient domiciliés en grand nombre dans la partie de la Grant Rue ou rue Saint-Denis qui s’étendait depuis l’hôpital Sainte-Catherine jusqu’à la Porte de Paris et qui était appelée la Sellerie. La rue Erembourg de Brie portait aussi le nom de rue des Enlumineurs, qu’elle devait à la profession de ses habitans, composés presque exclusivement d’enlumineurs, de parcheminiers et de libraires. C’était dans les rues Trousse-Vache et Quincampoix que les marchands de tous les pays venaient s’approvisionner de mercerie. Les tisserands étaient établis dans le quartier du Temple, rue des Rosiers, des Ecouffes, des Blancs-Manteaux, du Bourg-Thibout, des Singes ou Perriau d’Etampes, de la Courtille-Barbette et Vieille-du-Temple. Jean de Garlande nous apprend que les archers, c’est-à-dire les fabricans d’arcs, d’arbalètes, de traits et de flèches, avaient élu domicile à la Porte Saint-Ladre. On comptait un grand nombre de fripiers dans la paroisse des Saints-Innocens. Les attachiers demeuraient sur la paroisse Saint-Merry, car, durant le carême, ils cessaient

  1. G. Fagniez, Corporations et syndicats, p. 10.
  2. Texte de Richer, cité par Flach, t. II, p. 378.
  3. La rue des Bouchers, à Limoges, en offre, aujourd’hui encore, un très curieux exemple.