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BUSSY-RABUTIN[1]

Encore un livre qui était nécessaire, qu’il fallait écrire pour faire connaître exactement un homme d’une certaine importance, appartenant au moins à la petite histoire et qui nous était parvenu tout enveloppé de légendes épaisses. M. Gérard-Gailly s’est chargé de ce soin et s’est acquitté de cette tâche d’une manière solide et d’une manière charmante. Il nous a mis dans l’intimité de Bussy-Rabutin de telle sorte que toutes légendes ont disparu et que la vérité, maintenant, sur ce personnage et sur ses entours est absolument établie. Et avec cela on ne peut pas avoir plus d’esprit que M. Gérard-Gailly, plus de bonne grâce alerte, plus d’humour, plus de verve dans les discussions et plaidoyers, ni meilleur style. Son livre est agréable autant qu’il est essentiel.

J’y trouve des taches qui me seraient indifférentes ailleurs et qui me « touchent, » comme disait Maynard, c’est-à-dire qui me choquent, dans un ouvrage de ce mérite. Comment un aussi « honnête homme » que M. Gérard-Gailly peut-il écrire : « Boileau avait jadis agoni Georges de Scudéry ? » Comment peut-il dire : « Il [Bussy] possédait à douze ans sa langue latine et ses vieux auteurs ; mais la langue grecque peu ou prou ? » On ne voit pas de quelle manière Bussy pouvait s’y prendre pour posséder le grec peu ou beaucoup. Cela est furieusement vague. — On s’étonne aussi que le Roi, qui, à la vérité, pouvait tout, ait pu envoyer Bussy « en garnison à Moulins en Nivernais » parce que l’on croit généralement, que Moulins est en Bourbonnais ; et s’il s’agissait de Moulins en Nivernais, il fallait lui donner son vrai nom, Moulins-Engilbert ; mais il s’agit bien, réellement, de Moulins sur l’Allier.

  1. Un académicien grand seigneur et libertin au XVIIe siècle. Bussy Rabutin, sa vie, ses œuvres et ses amies, par M. E. Gérard-Gailly, 1 vol. in-8o ; Champion.