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malheureuse. A plusieurs reprises, elle se plaignit à l’ambassadeur de France, M. d’Aubusson, et celui-ci avertit son gouvernement ; timidement d’abord et par circonlocutions, puis en termes formels, il écrivit à Paris que la Reine elle-même lui avait confié sa peine[1].


II

L’Empereur poussait alors sa guerre de 1809 contre l’Autriche Après les foudroyans succès du début, la fortune l’avait trahi à Essling ; il ressaisit la victoire à Wagram et pour longtemps la fixe. Wagram cependant n’est plus Austerlitz ou Iéna : l’ennemi est vaincu, non détruit. Durant cette fin de campagne, Napoléon se prend à regretter l’absence de celui de ses lieutenans qui savait le mieux achever la victoire ; il regrette Murat, incomparable dans la poursuite, prompt à précipiter des masses de cavalerie sur l’ennemi ébranlé, à le rompre, à le disperser, à transformer sa retraite en désastre. Il dit à Berthier : « Si j’avais eu le grand-duc, — il continuait d’appeler Murat le grand-duc de Berg, par habitude, — à la tête de ma cavalerie à Wagram, il ne se serait pas échappé un seul Autrichien[2].

Après la paix conclue avec l’Autriche, après le retour de l’Empereur en France, un double et insigne événement s’annonce : le divorce que suivra immédiatement le second mariage, l’union qui doit assurer en France l’hérédité effective du pouvoir et promettre une lignée d’empereurs. Pour les dispositions décisives, Napoléon veut s’entourer de tous les membres de sa famille et se fortifier de leur présence. À cette occasion, il tiendra à Paris l’assemblée des rois d’Occident. Il convoque Murat comme les autres ; le 23 novembre 1809, après lui avoir écrit à propos des affaires de Rome, il ajoute de sa main ce post-scriptum : « Je serai à Paris tout janvier ; si vous venez, vous me trouverez toujours le même pour le roi de Naples que pour le général Murat. »

Le roi et la reine de Naples se rendirent à l’appel. Dès le 4 décembre, ils étaient tous deux à Paris où ils assistèrent à l’accomplissement du divorce impérial. A la fin de décembre,

  1. Voyez Driault, p. 612-615, d’après les rapports de l’ambassadeur.
  2. Berthier à Murat, 29 août 1809. Archives Murat.