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lettre du 24 avec détail avant de la recevoir, ayant prévu toutes tes objections sur un événement qui fera, j’en suis sûre à présent que je connais l’Impératrice, le bonheur de l’Empereur et par conséquent celui de nous tous…

« Je réponds à présent à ta lettre du 23. J’ai soupiré à la description que tu me fais de ton dîner avec nos chers enfans, et je suis bien sûre que vous avez pensé à moi ; mon cœur et mon âme tout entière vont continuellement au milieu et avec vous. Je suis charmée qu’Achille soit satisfait de sa machine électrique ; il paraît que notre chère Louise lira encore avant Lucien, mais ce n’est pas étonnant ; ce pauvre petit est toujours retardé dans ses études par quelque indisposition. J’espère que ton séjour en Calabre ne sera pas long et que tu es déjà de retour et sur le chemin de Paris.

« J’espère que cette petite fièvre dont tu me parles n’aura pas eu de suite ; ménage-toi, je t’en conjure, épargne-moi ces inquiétudes, car tu sais que le bonheur est incompatible avec moi lorsque je te sais souffrant.

… « Je suis de retour de Braunau ; j’y avais été parfaitement reçue et l’empereur d’Autriche m’avait envoyé l’archiduc Antoine pour me complimenter. J’ai trouvé l’Impératrice belle de tournure, de la noblesse dans la taille, d’une grande fraîcheur ; de plus, elle a une douceur charmante dans le caractère et ne demande qu’à plaire et à se faire aimer. Je suis sûre que l’Empereur sera parfaitement heureux et que ce que tu dis qu’elle ne t’aimera pas et autres choses n’arriveront jamais. Ce matin, lui ayant dit que j’allais t’écrire : « Je vous supplie, ma sœur, de dire « au roi de Naples qu’il me donne son amitié ; je le désire tant : « j’ai beaucoup entendu parler de lui, j’espère qu’il viendra à Paris « et je serai heureuse de faire sa connaissance. » Elle est excessivement bonne et douce et ne m’appelle jamais que sa sœur la reine de Naples, et toutes les fois qu’elle voit qu’on m’apporte une lettre, elle me demande toujours : « Est-ce du roi de Naples ? » Elle me répète combien elle serait heureuse si l’Empereur la conduisait à Naples, qu’on dit que c’est un si beau pays qu’elle désirerait bien le voir. Je te promets que celle-là ne se mêlera d’intrigues d’aucune manière.

« Nous passons tous les jours seize heures ensemble dans la même voiture, et je t’avoue que je la trouve charmante, d’une douceur d’ange, et on a bien le temps de se juger