Page:Revue des Deux Mondes - 1910 - tome 55.djvu/520

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

« Du reste, l’Empereur est parfait pour toi et me demande tous les matins si j’ai reçu des lettres du roi des lazzaroni et si l’expédition s’avance ; il est gai, charmant et parfait pour moi. Hier, j’avais fait mettre les chevaux de poste pour partir, mais il les a fait ôter et me voici à Rambouillet pour je ne sais combien de jours, car tu sais que lorsqu’on est près de lui, on ne le quitte pas aisément, et il veut que je reste encore quelques jours. Les espérances que l’Impératrice est grosse se soutiennent, et je crois pouvoir dire affirmativement qu’elle l’est ; ce sera un grand bonheur… »

Le 22 juillet, la Reine obtint enfin son congé accordé d’assez mauvaise grâce ; dans la nuit suivante, elle montait en voiture pour retourner d’un trait à Naples. La pensée de revoir ses enfans et d’en jouir à son aise la ravissait. A Naples, elle ne retrouverait pas Murat qui avait été prendre en Calabre le commandement de ses troupes et préparer la descente en Sicile, mais plus rapprochée de lui, elle se ferait mieux entendre. Nul doute que son intime désir ne fût de gouverner le Roi sans qu’il s’en aperçût et de s’immiscer aux choses d’État en ayant l’air d’y toucher le moins possible. Pour dissimulée qu’elle fût, cette ambition lui vaudrait de cuisans soucis ; c’était trop que de rechercher à la fois le pouvoir et le bonheur.


ALBERT VANDAL.