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Page:Revue des Deux Mondes - 1910 - tome 55.djvu/602

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une même circonscription, les lieux de vote sont nombreux, je ne vois pas trop à quoi les véhicules pourront servir, à moins que ce ne soit pour transporter les infirmes et les vieillards, les old age pensioners. Cette question des old age pensions a joui ; un grand rôle dans les élections. On sait que le parti libéral, depuis qu’il est au pouvoir, a fait passer un bill assurant des pensions aux vieux ouvriers dans certaines conditions. Ce bill n’a pas été précisément combattu à la Chambre des Lords. Il est du nombre de ceux qu’elle a laissés passer. Mais les Unionistes ont fait cependant remarquer que ce bill n’avait pas été suffisamment étudié, et que les dépenses dépasseraient vraisemblablement les prévisions. C’est ce qui, en fait, est arrivé. Aussi les Libéraux avaient-ils, au commencement de la campagne électorale, répandu le bruit que, si les Unionistes revenaient au pouvoir, ils aboliraient les old age pensions. M. Balfour a répondu en s’engageant formellement à les maintenir, et l’assurance donnée par lui a même été affichée dans les bureaux de poste où se paient les pensions. Mais les old aged qui bénéficient de ces pensions se méfient et le plus grand nombre d’entre eux pourrait bien voter contre les Unionistes. Nous saurons tout cela ce soir.


Dimanche 16 janvier.

Londres, qui m’avait semblé un peu morne hier dans l’après-midi, peut-être parce qu’il pleuvait à torrens, s’est réveillé le soir. De très bonne heure, et bien que les résultats ne dussent être connus qu’assez tard dans la soirée, une foule énorme, dont je n’essaierai pas d’évaluer le nombre, a commencé de s’entasser, en rangs serrés, sur la vaste place de Trafalgar Square. Dominant un baraquement en planches, s’élève un grand écran blanc sur lequel les résultats apparaîtront au fur et à mesure qu’ils seront télégraphiés. Cet écran blanc se détache brilla minent sur la façade noire du National Gallery. Il n’y a qu’à se mêler à cette foule. Le spectacle en est curieux. Elle est surexcitée, vibrante ; elle chante, et vocifère même par instans, mais elle est de bonne humeur et ne paraît en proie à aucune passion mauvaise. A peine deux ou trois résultats ont-ils paru sur l’écran que je constate que cette foule est en immense majorité unioniste. L’ami dont j’ai parlé au début et qui a bien voulu m’accompagner est lui-même un ardent unioniste ; il peut se laisser aller tout à son aise à la vivacité de ses