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Page:Revue des Deux Mondes - 1910 - tome 55.djvu/792

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Si elle partait, elle aurait horriblement peur d’être « retenue malade dans quelque mauvaise auberge. » Et tout cela se mêle de regrets exprimés, d’impatiences simulées, et par attention charmante à l’adresse indirecte du ménage impérial, Caroline dit à son mari : « Baise pour moi les petites mains du roi de Rome. »

Le 19 mai, le retour du courrier lui apprit positivement que le Roi ne la voulait pas aux fêtes du baptême. Aussitôt, elle se résigne ; sans murmurer et, à l’appui de la lettre d’excuses qu’elle rédige pour l’Empereur, elle s’impose d’être tout à fait malade, simule un état d’indisponibilité absolue, se condamne à plusieurs semaines d’immobilité et de quasi-solitude.

Durant cette sorte de quarantaine qu’elle s’inflige, ce qui la fâche, c’est que Mural, à en juger d’après les lettres qu’il lui adresse, ne paraît pas apprécier tout le mérite de son acte de renoncement ; même, il a l’air de croire, d’après des bruits de journaux et des commérages, qu’elle observe mal la règle nécessaire de claustration, qu’elle sort et voit du monde, qu’elle se permet au besoin des excursions. Dans ses réponses, la Reine fait sentir que son sacrifice, encore qu’accompli de bon cœur, devrait lui valoir plus de justice, plus de gratitude, et elle se pose un peu en victime du devoir d’obéissance conjugale :

« J’apprends aujourd’hui que le courrier que je l’ai envoyé le 2 est arrivé et que tu es content des nouvelles qu’il t’a apportées. Tu n’as pas dû être un moment inquiet sur la conduite que je pouvais tenir.

« Aussitôt que tes intentions m’ont été connues, je n’ai pas hésité un instant. Je n’ai pas examiné si c’était bien ou mal, si ce que tu me demandais était utile ou non à nos intérêts ; il m’a suffi de savoir que tu désirais que je restasse, et mon parti a été pris sur-le-champ. Nos volontés, comme nos intérêts, ne peuvent jamais être séparées ; mon désir exclusif est de faire ce qui te convient, et quoique le voyage de Paris pût flatter mon amour-propre pour l’objet qui m’y appelait et par la manière dont j’y avais été invitée, je n’ai pas regretté un seul instant de ne pas y aller, et j’ai été heureuse de te donner dans cette occasion un nouveau témoignage de mon attachement.

« Crois donc une bonne fois, mon cher ami, que je ne puis rien vouloir, ni rien faire que ce qui peut te convenir, et que rien ne peut me coûter lorsqu’il s’agit de marcher de concert avec toi et d’entrer dans tes intentions. Je suis quelquefois tentée de