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encadrés seraient supérieurs à 315 000 citoyens, mieux commandés, au moins aussi instruits et servant par patriotisme. Du reste, malgré les efforts de lord Roberts et malgré la propagande active de la Ligue du service national, la Chambre des Lords repoussa, le 12 juillet 1909, le service obligatoire par 123 voix contre 103. Il nous semble inutile, en conséquence, de parler davantage de cette réforme, qui serait grosse de conséquences ; d’ailleurs, on ne peut entrevoir l’époque où l’Angleterre sera prête à supporter une mesure si contraire à ses traditions et à ses mœurs.


Cette étude impartiale des forces militaires de la Grande-Bretagne nous amène à cette conclusion que son armée régulière est capable de faire sentir vigoureusement son action dans un conflit européen et que son armée territoriale répond bien à la mission limitée qui lui est confiée, du moins dans la situation actuelle de l’Angleterre vis-à-vis des grandes puissances. Aussi, lorsque lord Roberts a dit à la tribune de la Chambre haute : « Nous n’avons pas d’armée, ni pour combattre à l’extérieur, ni pour défendre notre pays ; » lorsque le duc de Bedford a prononcé cette parole : « L’armée de réserve de 200 000 hommes n’est qu’une armée de papier, » nous ne pouvons voir dans ces expressions qu’une exagération voulue en vue d’atteindre un but déterminé, l’adoption du service national obligatoire. Le colonel Repington, dans un article du Times, relève vivement le danger de pareils procédés de discussion. « Les nobles Lords, dit-il, ne peuvent rien faire de mieux, s’ils veulent perdre leurs partisans, se discréditer auprès de toutes les personnes modérées et raisonnables, décourager l’armée de la Couronne et déprécier la puissance de l’Angleterre aux yeux de ses amis et à ceux de ses ennemis. »

Nous serons satisfait si ces aperçus ont pu rassurer les amis de l’Angleterre sur la valeur militaire de son amitié.


Général H. LANGLOIS.