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Page:Revue des Deux Mondes - 1910 - tome 55.djvu/890

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donne ses premiers soins. Il juge avec raison que vouloir créer de toutes pièces des industries, pour lesquelles manquent et les gisemens métalliques et houillers suffisamment reconnus et les populations préparées aux travaux de la mine et de l’usine, serait créer quelque chose de factice, en tout cas de prématuré. Il vaut mieux chercher à améliorer ce qui existe, donner au paysan, doué de grandes qualités, la sécurité qui lui manquait jusqu’ici, le protéger contre les exactions des fermiers d’impôt, lui faire connaître les méthodes modernes de culture, mettre le crédit à sa disposition par l’intermédiaire de la Banque agricole qui existe et qui paraît susceptible de servir de base au développement des campagnes. Les ressources que l’État, une fois les réformes accomplies, pourra tirer des impôts actuels seront suffisantes pour équilibrer son budget, aussi longtemps du moins qu’il sera maintenu dans les mêmes proportions.

La population directement soumise à l’autorité turque ne dépasse guère, d’après d’anciennes statistiques, 24 millions d’habitans, répartis sur les 4 235 000 kilomètres carrés qui forment la superficie d’un empire dont l’étendue égale presque celle de l’Europe, déduction faite de la Russie. La Turquie d’Europe renfermerait 6 millions d’habitans ; l’Asie Mineure, 9 millions ; l’Arménie et le Kourdistan, 2 millions et demi ; la Mésopotamie, 1 million et demi ; la Syrie, 3 millions ; l’Arabie, 1 million ; la Tripolitaine, 1 million. Cette évaluation est fort incertaine et paraît inférieure à la réalité ; il suffit, pour s’en rendre compte, de rappeler que l’Arabie, dont la superficie est de 2 289 000 kilomètres carrés, ne figure dans ce tableau que pour 1 million. La Crète est sous le régime autonome que l’on sait ; Chypre a été donnée à bail à l’Angleterre, Samos paie un tribut, l’Égypte fait de même, mais ne peut être considérée, au point de vue économique tout au moins, comme faisant partie de l’Empire.

La propriété foncière revêt quatre formes différentes : miri, c’est-à-dire domaine impérial, qui constitue la majeure partie du territoire, et qui est concédé à des exploitans moyennant paiement par eux d’une redevance, faute d’acquitter laquelle ils sont déchus ; vacouf ou fondations pieuses, dont l’objet primitif était de pourvoir à l’entretien des mosquées et écoles ; mulikaneh attribués aux spahis, c’est-à-dire aux anciens soldats des califes, qui étaient exempts d’impôt ; enfin la terre mulk, c’est-à-dire possédée en pleine propriété par les particuliers : ce dernier