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Page:Revue des Deux Mondes - 1910 - tome 55.djvu/955

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pour émettre un avis. Tout ce que nous pouvons dire, en ayant été témoin, est que l’administration de la Ville de Paris a mis une merveilleuse activité à réparer les dégâts de l’inondation, à nettoyer les rues, à les repaver sommairement, à permettre à la circulation de s’y rétablir. On attaque souvent cette administration, sans que nous puissions toujours dire si c’est à tort ou à raison. Il est, par exemple, assez singulier qu’elle paraisse moins bien outillée pour faire face à la surprise d’une journée de neige qu’à une crue désordonnée de la Seine. Ces inégalités sont difficiles à expliquer. Mais nous n’avons aujourd’hui à parler que de l’inondation qui, pendant quelques jours, a inquiété Paris et qui a ravagé sa banlieue : pendant ces quelques jours et pendant ceux qui les ont suivis, l’administration de la Ville a mérité tous les éloges.

Maintenant le fleuve est rentré dans son lit ; toutefois il s’y agite encore et s’y livre à des sursauts qui pourraient nous causer des préoccupations nouvelles si le mauvais temps persistait. Nous restons à la merci des élémens. Notre meilleure raison d’espérer est que ces crues désastreuses sont rares, et qu’il ne s’en produit en moyenne qu’une par siècle ; mais cette raison est assez faible. Les secrets de la nature nous restent en grande partie mystérieux : nous devons le plus souvent nous résigner à constater des effets dont les causes premières nous échappent. Nous savons bien que la Seine a débordé parce qu’il a beaucoup plu, et longtemps ; mais pourquoi la saison a-t-elle présenté ce phénomène à un degré aussi exceptionnel, nous n’en savons rien, et, quand même nous le saurions, nous n’y pourrions rien. Le sentiment de solidarité humaine qui s’émeut chez nous en présence des forces aveugles de la nature vient de là, et l’impression qui en résulte, salutaire et bienfaisante, permet de croire à la vérité du dicton populaire qu’ « à quelque chose malheur est bon. »


Nous avons une fois de plus entendu parler des Balkans, de la Grèce, de la Turquie, de la Crète, enfin de la situation troublée de l’Orient. Par bonheur, nous nous rappelons le vieux mot que la question d’Orient est essentiellement une question d’Occident. Quand les grandes puissances sont d’accord entre elles et qu’elles veulent fermement le maintien de la paix, les moyens de faire prévaloir leur volonté ne leur manquent pas. C’est seulement lorsque l’une d’entre elles, poussée par une ambition impatiente, nourrit des projets parti culiers et cherche à en assurer l’exécution que le danger commence. On a pu craindre, il y a quelques mois, que l’Autriche ne fût cette