dame qui s’était levée, et avec un sourire d’enlente, la faisait passer devant lui. Il referma la porte et, marchant sur Laloubers cette fois, il lui dit à voix basse avec une condescendance polie :
— M. Dopsent me charge de l’excuser s’il est forcé de vous demander encore quelques minutes. Voulez-vous bien passer dans mon cabinet en attendant ?
Laloubers traversa le salon, poursuivi par des regards hostiles ; il se trouvait dans une vaste pièce donnant sur l’avenue : un jeune visage se leva de dessus des dossiers.
— Tiens, Duadic, mon cher ami ! Charmé de vous voir !
— Je suis heureux aussi, monsieur le Président.
Avec un sourire fugitif, le secrétaire au monocle s’éclipsa.
— Très occupés, n’est-ce pas ? demanda Laloubers.
— La besogne ne manque pas, dit Pierre Duadic en souriant.
— Et elle vous plaît ? demanda le magistrat frappé par les paupières cernées, les joues fondues du jeune homme.
— Tout le monde est très bon pour moi, dit Duadic évasivement. Je prépare mon droit, mais je crois que je suis plus fait pour l’enseignement.
— Oui, vous le pensez, fit Laloubers.
— Certainement, monsieur. Je n’ai pas le pied parisien.
— Bah ! cela s’apprend. À mon âge, je ne dis pas ; mais au vôtre ! Vous apprenez la vie !
— Oui, dit Pierre d’un ton incertain. Une grosse voix bien connue s’éleva, une portière battit, un rayonnant visage s’encadra au seuil, deux mains robustes se tendirent :
— Ah ! mon cher ami, je vous ai fait attendre. La cordiale étreinte fit plaisir à Laloubers : aurait-il douté de son cher Dopsent ?
Déjà il était happé, entraîné dans un somptueux cabinet de travail. Ah ! dame, ce n’était plus celui d’Hossegor !
— D’abord, vous dînez avec nous ! Pas de non ! C’est comme ça. Gabrielle va être joliment contente, et moi donc ! Allons ! c’était toujours son Dopsent.
— Voulez-vous la voir ? — Et déjà, il allongeait le doigt vers le timbre : — Non, j’oublie, elle vend aujourd’hui au ministère de l’Intérieur pour une œuvre de charité.