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contre les Lords a parfois revêtu une allure révolutionnaire, elle a toujours conservé un caractère religieux.

Le chant de guerre des meetings radicaux est un hymne sacré :


Sonnez du clairon, en l’honneur de la liberté, gars, et qu’il retentisse au loin. — Marchons ensemble à la victoire, car Dieu est avec nous. — La voix de la nature tonne par-dessus la marée qui monte : — Dieu a créé la terre pour le peuple, — La terre ! la terre ! C’est Dieu qui l’a donnée, — La terre ! la terre ! Le sol sur lequel nous nous tenons debout ! — Pourquoi serions-nous des mendians, avec le bulletin de vote dans la main ? — Dieu a donné la terre au peuple.


Les voix des puritains les plus illustres se sont fait en- tendre dans les meetings radicaux. Dans la grande réunion organisée à Trafalgar Square, le 4 décembre, le docteur Clifford fut un des orateurs les plus applaudis : « L’armée de Pharaon, s’est-il écrié, a été engloutie dans la Mer-Rouge : j’espère que la Chambre des Lords va disparaître dans la mer rouge qui monte. » Le 16 décembre, le Christian World publie d’innombrables missives de pasteurs non conformistes, engageant leurs ouailles à combattre le bon combat. M. D. Lloyd George, un ancien prédicateur laïque, défend son budget, dans une réunion à laquelle sont conviés les fidèles des Églises dissidentes. Le Conseil national des Églises évangéliques libres lance un manifeste. La Liberation Society, dans une lettre aux électeurs, rappelle que les Lords « ont rejeté dix lois qui mettaient fin aux incapacités dont étaient frappés les catholiques ; repoussé sept Bills qui admettaient les Juifs à siéger dans le Parlement ; déchiré quatre lois qui ouvraient les Universités nationales à tous sans distinction de croyances ; rejeté des Bills qui autorisaient les non-conformistes à être mariés dans leurs Églises et enterrés avec les prières de leurs pasteurs, dans les cimetières de leurs chapelles. » Des affiches répandues à profusion ont démontré que le budget est conforme aux préceptes évangéliques, et que « le Christ aurait voté pour les réformes financières. »

Et Punch, irrité de cette intervention céleste, de demander gravement que la Constitution soit remaniée de manière à assimiler la Divinité au Souverain et à leur imposer une égale neutralité. Cette propagande religieuse a été moins efficace qu’en 1906. Les protestans ne sont plus condamnés à la prison pour refus