Page:Revue des Deux Mondes - 1910 - tome 56.djvu/616

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

renommés. Quant au nombre des conservateurs élus, il est exactement le même : 273. J’ajoute que, hier comme aujourd’hui, une comète mystérieuse intriguait les savans et préoccupait les enfans.


IV

A première vue, les Communes de 1910 ne semblent pas très différentes de celles qu’elles ont remplacées. Les couloirs sont toujours envahis par une foule démocratique dans ses vêtemens, plébéienne dans ses allures, qui surprend sous ces voûtes, gothiques, éclairées par de pâles vitraux. Les députés, qui vont et viennent, paraissent appartenir, presque tous, à la petite bourgeoisie ou à la classe ouvrière. Les moustaches sont nombreuses et les barbes tolérées. La jaquette est un luxe et le veston est admis. Le « haut de forme » devient un symbole conservateur, que le policeman de service est seul à considérer avec déférence. Les tailles sont petites ; les corps souvent mal bâtis ; les visages, parfois, tendus et nerveux. Et lorsqu’un aristocratique sportsman vient à passer, rasé, grand, carré, il a l’air d’appartenir à une autre race et à un autre peuple. Ces silhouettes, rares en 1906, sont plus fréquentes en 1910. Et c’est déjà un premier changement.

Il se précise, quand des couloirs on passe dans la salle historique où, face à face, séparés par la chaise du Speaker et par la table aux ferrures de cuivre sur laquelle repose la masse dorée, siègent les deux partis. En 1906, les radicaux étaient si nombreux qu’ils débordaient sur les bancs de leurs adversaires. Les conservateurs, — une poignée, — se serraient pour faire place à la gauche ouvrière et aux nationalistes irlandais. En 1910, les tories reprennent possession de leurs bancs. Seuls, les Irlandais restent leurs voisins. Ouvriers et radicaux se serrent et s’empilent pour tenir sur le côté qui leur est réservé.

Ces différences extérieures sont confirmées par les statistiques, par celle des professions d’abord. Les travailleurs manuels ne sont plus que 40, au lieu de 58. Les avocats et les avoués sont moins nombreux : 141 contre 171. La baisse des publicistes est très nette : ils tombent de 52 à 28. Médecins et professeurs sont en recul. Les négocians se maintiennent. Les industriels augmentent légèrement. Le progrès des financiers est plus sensible :