une affaire. Un journaliste devrait, lui aussi, être un mandataire du peuple, un député qui écrit ; le journalisme serait ainsi une espace de troisième Chambre avec mandat de l’être. » Napoléon III avait voulu, en fin de compte, témoigner son estime envers Emile de Girardin en le nommant, aux dernières heures de son gouvernement, membre du Sénat impérial.
Passant de France en Russie et ayant à s’exprimer sur le compte du Tsar, il dit dans un de ces entretiens familiers : « La grande élévation de sentimens d’Alexandre lui a fait commettre une faute grave que la Russie paiera très cher un jour. Je le dis immédiatement au prince Orlof qui m’annonçait la libération complète des serfs : « Dans vingt ans, vous aurez toute une génération de déclassés, les uns serfs affranchis, les autres nobles qui auront dévoré le prix du rachat de leurs serfs et qui tous ne sauront faire autre chose de leur liberté que de conspirer et d’entraîner avec eux la jeunesse et les mécontens. Vers quel but ? Peu importe ! Par pur besoin révolutionnaire... Le Tsar pense comme moi et je le sais de sa bouche même. Il s’attend à la révolution que je lui ai prédite et son gouvernement cherche à la diriger dans une voie patriotique. Voilà la cause du panslavisme. C’est une visée bien dangereuse et qui pourrait occasionner plus d’une guerre en Europe. »
La pensée de l’Empereur se reporta ensuite sur l’Allemagne nouvelle. « Celle que j’ai si bien connue, dit-il à Mels, semble ne plus exister. C’était un beau pays que j’ai bien aimé et où l’on pourrait être très heureux. Ce mélange de rêverie et de science était charmant et, sachez-le, j’ai eu souvent la nostalgie de l’Allemagne... A vrai dire, je n’aurais jamais cru que le désir de revenir dans votre pays, pour quelque temps, dût s’accomplir ainsi !... On dirait que vous autres Allemands, vous avez fait un rêve et que vous vous êtes réveillés. Un beau et glorieux réveil ! Victoires sur victoires ! succès sur succès ! Mais aidez-moi donc à retrouver cette pensée rimée de Gœthe qui donne un si salutaire avertissement aux gens et aux nations que la fortune favorise ? — Votre Majesté veut dire celle-ci :
Nichts ish schwerer zu ertragen
üls eine Reihe von glàcklichen Tagen !
— C’est cela même ! Comment supporterez-vous cette série de succès inouïs ? Qu’en sortira-t-il ? Et l’Allemagne que vous