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Page:Revue des Deux Mondes - 1910 - tome 57.djvu/853

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résumé, le récit de V. Couailhac ; mais, dans l’Intermédiaire des Chercheurs et Curieux, M. Boghaert-Vaché traite de légende cette représentation, et fournit des preuves à l’appui de son dire.

Montansier offrit aussi, et le ministère accepta sa proposition de conduire à Bruxelles une troupe dite de la Propagande. La voilà protégée par le gouvernement, acclamée par la foule ; elle rouvre son théâtre avec succès, et trouvant sa salle du Palais-Royal trop petite, fait construire à grands frais, rue de Richelieu, un autre théâtre qui prend le nom de National. Mais les autres directeurs la jalousent ; les monomanes de la persécution, Chaumette, Hébert, la dénoncent ; arrêtée, incarcérée à la Petite Force, du fond de sa prison elle persévérerait continuer les représentations, et, délivrée après le 9 Thermidor, réclame 7 millions d’indemnité pour avoir été dépossédée du Théâtre National, affecté à l’Opéra par un arrêté du Comité de Salut Public de 1794. Mal inspirée cette fois, elle refusa 1 600 000 francs, et il fallut bien se contenter de 1 300 000 francs, qui lui furent alloués en 1812 par un décret daté de Moscou. Inlassable, indomptable, elle forme une nouvelle troupe en 1807, et elle avait plus de soixante-dix ans. Toutefois, le décret de 1812 lui permit de satisfaire ses goûts de luxe, d’avoir aux Ternes une maison agréable, largement ouverte aux artistes de talent : elle y mourut le 13 juillet 1820. Montansier avait connu (qui n’avait-elle pas connu ? ) Dazincourt, un grand observateur des traditions, lequel avait conservé celle des petits soupers. « Tous les soirs il rassemblait quelques amis, auteurs et acteurs, qu’il emmenait pour les faire asseoir à sa table très bien servie. Là on causait sur la représentation qui venait d’avoir lieu, et sur l’art théâtral en général. Ces convives étaient des feuilletons vivans, ou plutôt des juges prononçant leur arrêt à huis clos. Les soupers prirent une certaine extension à l’époque où Dazincourt gagna un terne à la loterie : il put dès lors vivre grandement. La loterie lui improvisa une fortune, comme de nos jours la Bourse crée la richesse à des spéculateurs heureux. »


Dans un inventaire, même bien incomplet, du chariot de Thespis faisant partie du mobilier mondain, on ne saurait oublier Virginie Déjazet (1798-1875), celle que M. Jules Claretie