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LES DROITS DE SUCCESSION
EN FRANCE ET À L’ÉTRANGER


I

Personne ne nie l’importance des questions financières chez les nations modernes ; mais, tout en reconnaissant la place qu’elles doivent tenir dans leurs préoccupations, les hommes, entraînés par le courant de la vie, le labeur quotidien et le souci de leurs intérêts immédiats, ne prennent souvent pas la peine de réfléchir aux conséquences des lois nouvelles, ni de mesurer l’étendue des répercussions qu’elles auront sur l’existence des individus et l’organisation de la société. Et cependant la hâte et l’imprudence des législateurs, sans cesse occupés à remanier l’arsenal des règlemens fiscaux et à chercher partout des ressources pour remplir le tonneau des Danaïdes qui s’appelle le budget, nous ménagent de telles surprises et aboutissent à des votes si périlleux, que les plus indifférens doivent finir par ouvrir les yeux. Parmi les innovations qui, depuis un petit nombre d’années, modifient le programme de nos impôts ou plutôt y ajoutent sans cesse d’autres fardeaux, il n’en est pas de plus grave que la transformation et l’élévation des droits de succession, qui prennent une place de plus en plus grande dans les législations contemporaines ; simples taxes fiscales à l’origine, ils tendent à devenir un instrument de destruction de la propriété individuelle et de péréquation de la richesse, ou plutôt, ce qui n’est pas la même chose, d’absorption des fortunes particulières par le Trésor public. Il y a là un retour au droit féodal, qui devait être le phénomène le plus inattendu