idées avaient de vrai, Auguste Reichensperger offrait je ne sais quoi de plus séducteur, qui manquait aux trois autres. Pour le joueur politique qu’était Windthorst, on avait de la défiance ; on s’inclinait malgré soi, avec une déférence un peu gênée, devant la conscience d’un Mallinckrodt ; la compétence d’un Pierre Reichensperger, si exercée, si déliée, invitait à la discussion, chicaneuse et subtile ; Auguste Reichensperger parlait avec tous les enthousiasmes de son cœur, et contre lui, les cœurs se mettaient en défense, de peur d’être gagnés. Du romantisme, il avait hérité les visions gothiques et les belles intuitions d’histoire ; des expériences faites en 1848, il avait gardé ces façons de générosité politique, qui parfois, dans une assemblée, gagnent d’autant plus aisément deux pouces de terrain qu’elles ont paru en céder un. Il avait intimement connu Charles de Montalembert, glorieux vengeur de toutes les souffrances iniques ; il avait voisiné avec le « catholicisme libéral ; » il en avait partagé les candeurs conquérantes. Et dans les assemblées publiques, les ennemis de l’Eglise le craignaient comme les trois autres, mais la peur qu’il leur inspirait honorait son cœur ; c’était la peur de se sentir désarmés devant un lutteur que personnellement ils inclinaient à aimer.
La discussion scolaire, dès qu’elle s’ouvrit, s’évada du terrain purement politique sur lequel Bismarck aurait assurément préféré la cantonner, et devint un débat pour ou contre l’Eglise.
Le matérialiste Virchow mit le clergé sur la sellette. Il proclama que sa mission civilisatrice était périmée ; il aligna des statistiques, dénonça l’insuffisance de l’instruction dans les pays catholiques, et les ravages de l’ignorance et du typhus dans la catholique Silésie. Et c’est parce que le projet de loi visait, d’après lui, à écarter la domination pernicieuse de l’Eglise sur l’école, que Virchow le voterait.
« Il vise, disait Auguste Reichensperger, ou tout au moins il aboutira à créer l’école sans Dieu. ». — « C’est une loi païenne, » insistait un autre membre du Centre, Bruel, protestant du Hanovre ; « elle répond à l’idée païenne de l’Etat Dieu. » Windthorst, aussi, annonçait à la Prusse qu’elle deviendrait un Etat païen ; que tous les chrétiens, protestans ou catholiques, s’uniraient pour réclamer la réalisation de la liberté de l’enseignement. Il y avait eu, dans