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penser à tout ce qui est nécessaire à sa manœuvre, notamment aux grands hangars pour l’abriter, aux usines pour fabriquer l’hydrogène et aux approvisionnemens de toute nature.

Chaque hangar avec le terrain qui l’environne et les appareils dont il est pourvu constitue un port pouvant servir à la fois d’escale et de lieu de ravitaillement aux dirigeables de notre armée. Ces ports aériens doivent être établis en nombre suffisant, dans des emplacemens fixés par l’état-major général d’après des considérations stratégiques. Il vaut mieux, si on dispose de crédits limités, réduire d’une ou deux unités le nombre de nos dirigeables, mais donner à chacun d’eux ce qui lui est nécessaire. Cette vérité, qu’on ne comprend pas toujours en France, n’est pas spéciale à l’aéronautique : elle s’applique à toutes les organisations possibles. Il vaut mieux avoir huit unités bien pourvues, que d’en avoir douze ou quinze manquant de tout et par conséquent inutilisables.

Au point de vue personnel, je n’ai parlé jusqu’ici que des aérostiers proprement dits, c’est-à-dire des troupes chargées de faire à terre la manœuvre de nos navires aériens : il faut aussi songer à l’équipage de ces navires qui doit comprendre des pilotes et des mécaniciens. L’instruction de ces derniers ressemble, sauf quelques détails, à celle de tous les mécaniciens ; quant aux pilotes, il leur faut évidemment un apprentissage spécial.

Indépendamment de ce personnel technique, les équipages de nos aéronefs doivent comprendre des observateurs. Ceux-ci ne peuvent être recrutés que parmi les officiers d’état-major ; ils doivent avoir la connaissance parfaite de toutes les formations et de tous les mouvemens des troupes ; de plus, ils doivent posséder personnellement la confiance du général qui les envoie, afin qu’il attache aux résultats de leurs reconnaissances aériennes l’importance qu’ils méritent. Ce serait une erreur de croire qu’il suffit d’embarquer un officier d’état-major à bord d’un dirigeable pour qu’il devienne instantanément un bon observateur. Pour qu’il en soit ainsi, il faut encore qu’il se trouve parfaitement à son aise au sein de l’atmosphère, et qu’il puisse du haut de la nacelle observer avec autant de tranquillité que s’il était installé sur la terre ferme. Cela ne s’acquiert pas en un jour ; il y a même des natures absolument rebelles aux voyages aériens et incapables de se trouver jamais en l’air tout à fait à leur aise.