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vraiment belle, des Histoires poétiques : il s’appelle La Paix armée. C’est une satire, comme le mot Iambe l’indiquerait à lui seul, et cette satire, violente, mais faible, est dirigée contre le génie allemand. De cette déclamation, Saint-René Taillandier, dans sa notice sur Brizeux, avait, cité un vers, un seul :

L’éternel professeur avec la fiancée
Éternelle………….

il a feint d’avoir oublié le reste, et il a eu raison. Jamais Brizeux n’a mieux montré combien peu il était doué pour composer des « diatribes » virulentes, à la mode de Juvénal, comme l’auteur de la Curée et de l’Idole.

La lettre datée du « 12 août 55 » paraîtra plus explicite.


Je sais, de plus d’un côté, que vous n’oubliez pas, en action, ceux qui sont absens. La Revue, Lacaussade, Sainte-Beuve lui-même, m’en ont parlé. Donc, cher ami, mes grâces infinies dès aujourd’hui, en attendant que j’arrive à votre table de thé. Nous causerons encore à cœur ouvert et vous me conterez, vous, ex-militaire, vos campagnes littéraires de cette année. J’en sors encore vainqueur, à ce qu’il paraît, car rien d’officiel ne m’est arrivé. Vous, heureux juge, vous n’en êtes plus, depuis longtemps, à combattre ; et c’est justice. Nul plus que moi n’a, dès les premiers jours, été heureux de vos triomphes. Dans le présent, comme dans le passé, votre très cordial et dévoué

A. BRIZEUX.


Cette seconde lettre contient plus que le remerciement du lauréat. C’est le souhait du candidat au titre d’Académicien qui s’y laisse déjà pressentir, qui même arrive à s’y produire, assez timidement, par quelques atteintes, non pas légères, mais faibles, sous le couvert des complimens, à travers les sous-entendus.


VI

Après vingt-huit ans d’une vie littéraire, silencieuse et désintéressée, Brizeux fut donc mordu par cette ambition : il se laissa persuader qu’il possédait des titres suffisans pour être admis à l’Académie française. C’est surtout Alfred de Vigny qui provoqua chez lui cette velléité de confiance en soi-même. Il avait laissé tomber cet oracle : « Que l’auteur de Marie, des Bretons et de la Fleur d’or se hâte de donner encore le recueil des Histoires