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d’ouvrir un bureau de poste et une école, partout où les colons seront assez nombreux. Il faut faire plus et mieux ; et, comme les crédits manquent, la Conférence consultative (5 décembre 1909) a formellement invité le gouvernement à créer, par voie d’emprunt, les écoles dont le besoin se fait chaque jour plus impérieusement sentir. En attendant, le Protectorat autorisera prochainement l’enseignement de l’italien dans plusieurs écoles françaises. Outre l’ouverture, à Tunis, d’un cours de littérature italienne, on créera des cours d’italien dans quatre de nos écoles (deux à Tunis, une à Sfax, une à Sousse). Une amélioration aussi opportune aura un grand retentissement ; la population italienne l’accueillera avec joie et reconnaissance.


III

Le 1er janvier 1909, on comptait en Tunisie 102 865 Italiens contre 38 770 Français, environ 3 Italiens pour 1 Français. D’où le cri d’alarme : « Nous aurons bientôt une province italienne à administrer ! » On ne trouve guère qu’en Suisse une situation aussi paradoxale. Là, en douze ans, l’accroissement des nationaux n’a pas dépassé 9 pour 100, tandis que celui des étrangers atteignait 67 pour 100. Les autorités fédérales murmurent vaguement les mots de « péril national » et songent, pour enrayer ce mouvement, à la naturalisation obligatoire et automatique des fils d’étrangers qui naissent dans le pays. Cette direction inattendue de l’opinion helvétique est un sujet de préoccupation pour les 150 000 Italiens devenus habitans de la Confédération.

C’est en petit ce qui se passe pour la Tunisie, où l’on a cherché, où l’on cherche encore à tourner la question. Pour combattre l’anomalie signalée, on a voulu favoriser la petite colonisation nationale, établir des paysans français dans la Régence. Le gouvernement poursuit ces essais par deux procédés : 1° la caisse de colonisation (actif, 8 millions) lui fournit des capitaux pour acheter des terres aux indigènes : en 1908, il a acquis 10 862 hectares, à rétrocéder aux colons français ; 2° la location des biens habous (fondations pieuses), à enzel (baux perpétuels). Grâce à cela, un Français débarquant à Tunis n’a aucun débours à effectuer pour achat de terrain ; il peut immédiatement se