Peut-on croire, après tant d’atrocités, à ceux qui affirment que la Commune avait laissé le décret des otages en souffrance, désireuse au fond que quelque incident la délivrât du cauchemar d’un massacre possible dans les prisons ? Est-ce qu’au lendemain de ces terribles jours, un manifeste signé par Cournet, Viard, Vaillant, Eudes, Dacosta, Gois, Granger, Varlet, Viard et autres, ne contenait pas cette significative déclaration : « Pour nous, nous revendiquons notre part de responsabilité dans les actes justiciers qui ont frappé les ennemis du peuple, depuis Clément Thomas et Lecomte jusqu’aux dominicains d’Arcueil, depuis Bonjean jusqu’aux gendarmes de la rue Haxo, depuis Darboy jusqu’à Chaudey ? »
En déposant le projet de loi relatif aux obsèques solennelles des otages, Jules Simon disait : « Nous refusions de croire à la réalisation de sauvages menaces ; mais ce que nul n’aurait imaginé, c’est qu’à l’heure suprême on massacrerait les otages sans d’autres motifs que la vengeance, la haine et l’amour du meurtre. » M. Gautherot se demande si la postérité jugera l’excuse suffisante. En quoi le refus de croire à tant d’atrocités et la douloureuse constatation de tant d’infamies ont-ils l’air d’une mauvaise excuse ?… L’Assemblée qui entendait le discours de M. Jules Simon, en a été fort émue et a applaudi unanimement ces belles paroles : « Les corps des chères et déplorables victimes ont été recueillis avec un soin pieux. Quelques-uns, portant encore la trace de l’acharnement inconcevable des bourreaux, ne présentent plus aucune forme humaine et n’ont pu même être reconnus. Nous allons les rendre à la terre au milieu du respect et des larmes universels. » L’Assemblée a décrété hier par un vote unanime qu’elle représenterait le pays à la tête de ce cortège funèbre. Nous lui proposons aujourd’hui de décréter que les obsèques auront lieu aux frais du Trésor public. » Le rapport du comte de Melun constata le légitime hommage rendu aux victimes, et l’acte politique qui flétrissait les bourreaux. Il fit ressortir le grand enseignement qui résultait de ce terrible événement : d’une part, le courage et la résignation d’hommes affaiblis par l’âge et la souffrance qui ne trouvèrent de force que dans leur foi et leur sentiment moral ; d’autre part, les passions sauvages et les instincts féroces d’hommes qui, avec l’oubli de tout principe, avaient le mépris des lois divines et humaines.