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usé de leurs armes contre des hommes qui assassinent leurs généraux et ne craignent pas de voir succéder les horreurs de la guerre civile aux horreurs de la guerre étrangère, c’est possible ; mais, le combat terminé, ils rentrent dans la générosité du caractère national, et nous en avons ici la preuve matérielle exposée à tous les regards.

« Les hôpitaux de Versailles contiennent quantité de blessés appartenant à l’insurrection et qui sont soignés comme les défenseurs de l’ordre eux-mêmes. Ce n’est pas tout. Nous avons eu dans nos mains 1 600 prisonniers qui ont été transportés à Belle-Isle et dans quelques postes maritimes où ils sont traités comme des prisonniers ordinaires, et même beaucoup mieux que ne le seraient les nôtres, si nous avions le malheur d’en laisser dans les mains de l’insurrection.

« Je repousse donc, Monseigneur, les calomnies qu’on vous a fait entendre. J’affirme que jamais nos soldats n’ont fusillé les prisonniers ; que toutes les victimes de cette affreuse guerre civile ont succombé dans la chaleur du combat ; que nos soldats n’ont pas cessé de s’inspirer des principes d’humanité qui nous animent tous et qui seuls conviennent aux convictions et aux sentimens du gouvernement librement élu que j’ai l’honneur de représenter. J’ai déclaré et je déclare encore que tous les hommes égarés qui, revenus de leurs erreurs, déposeraient les armes, auraient la vie sauve, à moins qu’ils ne fussent judiciairement convaincus de participation aux abominables attentats que tous les honnêtes gens déplorent ; que les ouvriers nécessiteux recevraient pour quelque temps encore le subside qui les a fait vivre pendant le siège et que tout serait oublié, une fois l’ordre établi.

« Voilà les déclarations que j’ai faites, que je renouvelle et auxquelles je resterai fidèle, quoi qu’il arrive, et je nie absolument les faits qui seraient contraires à ces déclarations.

« Recevez, Monseigneur, l’expression de mon respect et de la douleur que j’éprouve en vous voyant victime de cet affreux système des otages, emprunté au régime de la Terreur, et qui semblait ne devoir jamais reparaître chez nous.

Le Président du Conseil,
Chef du pouvoir exécutif,
A. THIERS. »