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Page:Revue des Deux Mondes - 1910 - tome 60.djvu/946

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Cependant Tiepolo s’efforce de ressusciter les temps splendides du XVIe siècle. Mais cette intime correspondance entre la vie extérieure et le génie de l’artiste, — qui est une des conditions nécessaires pour susciter les belles œuvres d’art et dont on peut retrouver et admirer l’image fidèle dans les Cènes où Paul Véronèse amuse les yeux des plus fastueux spectacles, étale avec un luxe incomparable les élégances de la vie, cette glorieuse magnificence des maîtres de la mer, des patriciens de la République offrant des banquets aux rois, — ne le soutenait plus. Malgré tout, triomphant des obstacles, il sut, dans une certaine mesure, rendre à l’art vénitien, après un sommeil deux fois séculaire, quelque chose de sa grandeur et de son éclat. M. Molmenti nous fait parcourir toutes les étapes de la vie de Tiepolo, nous introduit dans le milieu où se forma son talent, établit l’origine et la valeur de ses peintures dans les nombreux chapitres sur l’art vénitien au temps de l’artiste, sur son œuvre à Venise et en Vénétie, en Lombardie, en Allemagne, en Espagne ; il montre la nature et le caractère de son art, l’influence qu’il exerça en France, en Allemagne, en Autriche, en appuyant son commentaire sur la représentation des tableaux ou des fresques les plus célèbres, dans 254 planches, dont beaucoup jusqu’ici étaient restées inédites, et l’on ne sait ce que l’on doit le plus admirer de la solidité de son information ou de la sûreté de son jugement.

C’est également un très bel ouvrage d’art que La Nativité de Notre Seigneur Jésus-Christ[1]avec les soixante superbes reproductions d’après les chefs-d’œuvre de la peinture et de la sculpture accompagnées d’un savant commentaire liturgique, artistique et littéraire, par le P. Raymond Louis, MM. André Pératé et Amand Rastoul.

L’esthétique et l’histoire occupent, on le voit, la plus large place dans les publications de cette année. Nous possédons des réflexions d’un peintre sur un autre peintre, des biographies d’artistes qui ont disserté sur leur art. Aucun n’a produit un ouvrage définitif et qui puisse servir à tous, si ce n’est Léonard de Vinci. Le seul livre qui enseigne à bien peindre c’est son Traité de la Peinture[2]. M. Péladan, pour la première fois, en a fait une traduction en français sur le Codex Vaticanus (Urbinas) 1270, complétée par de nombreux fragmens tirés des manuscrits du maître, et accompagnée de commentaires.

La Table et le Repas à travers les siècles[3]disent aussi à leur manière les mœurs d’un temps et d’un peuple. De toutes les questions

  1. André Marty.
  2. Ch. Delagrave.
  3. Lucien Laveur.