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partis d’opposition qui en 1889 ont obtenu une charte constitutionnelle et qui depuis n’ont cessé d’en réclamer la révision dans un sens libéral.


II

L’œuvre de destruction accomplie, l’empereur et ses conseillers créèrent les institutions nouvelles que nous nous proposons d’étudier ici. Avant d’en présenter un tableau d’ensemble, nous en déterminerons le caractère. Ces institutions n’ont pas été imposées tout d’un coup, copiées servilement sur des modèles européens. Pour donner à leur pays brusquement sorti de son isolement et bouleversé par la Révolution un régime qui lui permît de vivre et de se développer, les chefs du gouvernement firent les tentatives les plus diverses avant même de comprendre où était la solution désirée. Au début, ils se contentèrent des arrangemens provisoires que leur imposaient les circonstances ; puis, emportés par le mouvement romantique, ils cherchèrent à rétablir les traditions du passé, persuadés que l’oubli ou la corruption de ces traditions étaient la cause de leurs maux ; ils s’inspirèrent aussi de la Chine, qu’ils reconnaissaient depuis tant de siècles comme l’exemple parfait de la monarchie patriarcale ; mais les traditions du Japon ne pouvaient que médiocrement lui servir dans des conditions toutes nouvelles, et celles de la Chine ne l’avaient pas empêchée de tomber elle-même en décadence. Les réformateurs tentèrent alors de se frayer leur voie sans secours, ils multiplièrent des essais, presque toujours malheureux. Pourtant à travailler, à lutter de la sorte, ils se formèrent, ils s’instruisirent et reconnurent alors que, dans des circonstances semblables, les Etats de l’Europe avaient trouvé des solutions acceptables ; ils se mirent donc à étudier les constitutions de ces Etats. Dans le premier élan de ferveur démocratique, ils songèrent aux Etats-Unis et à la France, mais ils ne tardèrent pas à reconnaître qu’il serait peu sage de faire passer brusquement un peuple dont pendant des siècles la société avait été hiérarchisée, le gouvernement despotique et patriarcal, à un régime complet de liberté et d’égalité, que d’ailleurs les institutions des républiques convenaient peu à une monarchie de droit divin. Ils se tournèrent vers l’Angleterre, mais pour s’avouer bientôt que la pratique du régime parlementaire, telle