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divergences dogmatiques, luthéranisme et calvinisme, les luthériens tenaces, qui étaient demeurés rebelles à l’Eglise prussienne unie, n’avaient ni obtenu ni même réclamé une part des biens d’Église. Gerlach s’étonnait que les vieux-catholiques se montrassent plus ambitieux, et que l’Etat consentît. Les débats parlementaires dégénérèrent en discussions théologiques : on se querella sur l’infaillibilité, son vrai sens, sa légitime portée. Mais en quatre années, entre vieux-catholiques et catholiques romains, on avait vu s’élargir le fossé ; la primauté papale n’était plus le seul point qui les divisât. Un cousin du chef du Centre, qui comme lui s’appelait Windthorst, mais qui siégeait parmi les nationaux-libéraux, était tout heureux de faire savoir au Landtag que les vieux-catholiques, désormais, chicanaient un autre Concile, le Concile de Trente. A prendre à la lettre ce que disait ce Windthorst, ils ne pouvaient donc plus se donner comme les héritiers de l’Eglise romaine de 1809, mais, tout au plus, comme les héritiers de l’Eglise romaine de 1559 ; et l’aveu même de leurs audaces théologiques aurait pu se retourner contre leurs prétentions juridiques, que le projet de loi consacrait.

Le projet cependant devint loi et pesa comme une menace nouvelle sur tous les curés du royaume de Prusse : il suffirait que le chiffre de vieux-catholiques domiciliés dans leur paroisse apparût au pouvoir civil comme un chiffre « notable ; » alors ces curés cesseraient d’être les maîtres exclusifs de leur église, et concurremment, l’on devrait y célébrer deux cultes pour les catholiques fidèles au Concile du Vatican et pour les catholiques infidèles au Concile même de Trente.

Tout en même temps le ministère avait présenté, fait discuter, fait voter quelques articles, brefs et tranchans, qui achevaient d’exclure de Prusse « tous les ordres et toutes les congrégations de l’Eglise catholique. » Au bout d’un semestre, toutes les maisons religieuses devaient être fermées. La loi permettait au ministre des Cultes d’accorder un délai de quatre ans aux établissemens d’instruction ; elle exceptait de ses rigueurs les congrégations hospitalières, mais elle ajoutait qu’à tout moment une ordonnance royale pourrait les supprimer. C’était le juriste Hinschius qui avait, à la demande de Falk, élaboré ce projet : il avait allégué, pour le justifier, que les congrégations, cédant à l’impulsion de chefs étrangers ou d’évêques rebelles, étaient elles-mêmes un péril public, et que ce péril était aggravé par