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avait recouru pour la sauver ? Il est vrai toutefois que, résolue à mourir avec lui, c’est pour leurs enfans qu’elle se résigna à vivre.

Les documens sont muets aussi sur l’attitude des autres accusés. Etant donné ce que nous savons d’eux, on doit supposer que leur résignation et leur courage égalèrent leur infortune. Bientôt rappelés sur les bancs, ils y entendirent prononcer leur arrêt de mort. Bertrand de Saint-Pern y était compris ; on l’avait arrêté à la place de son père, et c’est pour des faits imputés à son père qu’on le condamnait, sans spécifier ni ses prénoms, ni son âge, qui ne furent inscrits qu’après coup dans le jugement. Dans ce jugement était compris le sieur Thomas qui, nous l’avons dit, avait été ramené à la prison du Luxembourg avant l’ouverture de l’audience.

Le même jour, à quatre heures, tous les condamnés étaient conduits à la guillotine, à l’exception de Mme de Cornulier dont l’exécution était ajournée et qu’à quelques jours de là, la chute de Robespierre devait sauver définitivement. Ainsi, se réalisait pour elle la prédiction d’une tireuse de cartes avec qui elle s’était trouvée en prison en même temps que d’autres prévenus. Sollicitée de leur dire la bonne aventure, la nécromancienne s’était écriée :

— Toutes les personnes ici présentes périront bientôt, à l’exception d’un homme et d’une femme.

Un prisonnier s’était alors approché de Mme de Cornulier, et lui avait exprimé l’espoir que c’est elle qui sans doute serait sauvée, parce qu’elle était la plus jeune et la plus intéressante en sa qualité de mère de famille.

L’exécution des condamnés du 1er thermidor portait à douze le nombre des personnes de la famille Magon qui périrent sur l’échafaud, dans l’espace de quelques semaines.


IV

Les événemens qui suivirent la journée du 9 thermidor ont été tant de fois racontés et avec un tel luxe de détails qu’il n’y a pas lieu d’en recommencer le récit. L’Histoire retentit encore des cris de vengeance qui s’élevèrent de tous côtés après la chute du triumvirat dont la France avait subi si longtemps le sanglant despotisme, et des acclamations qui saluèrent son renversement.