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qui le gênait dans ses mouvemens et qui l’avait encore obligé l’année précédente, pour revenir des bords de la Loire dans ses canlonnemens, à faire un détour qui avait failli lui être fatal. Il part de Jeufosse, un campement dont il est souvent question dans les expéditions normandes. C’est une position très forte, se dressant à pic d’une centaine de mètres entre Vernon et Bonnières, sur la rive gauche de la Seine, à la hauteur de l’île d’Oscelle, une des stations favorites des flottilles normandes. On retrouve même le nom de Rollon attribué à la colline assez proche de Rolleboise. Rollon. revenant de la direction de Paris, ne pouvait trouver un endroit plus favorable pour gagner la vallée d’Eure. La grande route menant à Pacy-sur-Eure se détache de celle de Rouen un peu en amont, mais, de Jeufosse même, part un vieux chemin creux, en partie taillé dans le roc, qui rejoint l’autre par le plus court au sommet de la côte. Les Normands le connaissaient bien : c’est encore par là que passera, un demi-siècle plus tard, une bande d’auxiliaires Scandinaves pour aller châtier le comte de Chartres qui avait attaqué le duc Richard Ier.

Il n’y a pas lieu de raconter ici en détail le siège de Chartres de 911, qui a été fort bien étudié par Jules Lair (le Siège de Chartres par les Normands) au soixante-septième Congrès archéologique de France tenu à Chartres en 1900. La ville avait déjà été prise ou plutôt surprise par les Normands, une cinquantaine d’années auparavant, et presque détruite. Depuis lors, elle s’était relevée et resserrée. Elle avait pour rempart une partie de son enceinte gallo-romaine et un mur improvisé qui réduisait l’étendue à défendre. L’Eure, qui coule au pied de l’esplanade d’une trentaine de mètres où se dresse la cathédrale, la protégeait en outre du côté Est. Il n’y avait en somme d’accessible qu’un seul point, qui constituait la gorge de la forteresse, où l’on arrivait de plain-pied. Le siège commença dans les règles, mais l’intervention d’une armée de secours où se trouvent Robert, comte de Paris, Richard, duc de Bourgogne, et Ebles, comte de Poitiers, vint troubler les assiégeans. Pendant qu’ils sont attaqués par les nouveaux venus, les Normands sont pris à revers par une sortie des Chartrains, à la tête desquels se trouve l’évêque Waltelmus (Gousseaume ou Gouteaume), portant une relique célèbre, la chemise de la Vierge, offerte à la cathédrale par Charles le Chauve et qui y est restée exposée à la