Page:Revue des Deux Mondes - 1911 - tome 3.djvu/333

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

à ton joug, les gagnera à ton génie et à ton œuvre, et portera jusqu’aux cieux ton empire et ton nom… »


Imperiumque tuum nomenque æquabit Olympo.


Il serait excessif de croire et de dire que le roi Charles III avait prévu toutes les heureuses conséquences du traité de Saint-Clair-sur-Epte. Du moins est-il équitable de lui rendre cette justice qu’il n’aurait pas agi autrement s’il les avait prévues. La postérité a été sévère pour ce pauvre roi dont le plus grand tort pourrait bien être d’avoir été faible et souvent trahi. Elle lui a conservé un surnom désobligeant, qui n’est peut-être qu’un contresens, car Richer, où se trouve pour la première fois l’épithète classique, ne l’emploie pas dans une acception défavorable. Il était, dit-il, « d’un caractère bon et simple, ingenio bono simplicique. » Il n’y a là rien d’injurieux, et il n’y a rien d’injurieux non plus dans Flodoard, son contemporain. Ce n’était pas un foudre de guerre, mais il a réussi où les foudres de guerre avaient échoué. Ne pouvant défendre sa frontière, il en a confié la garde à ceux mêmes qui l’avaient forcée. En les fixant au sol, il les a chargés de le défendre, et, ce qui vaut mieux, il les a intéressés à le défendre. Des empereurs romains qui jouissent d’une excellente réputation n’ont pas fait autre chose, et ils ne l’ont pas toujours fait avec autant de succès. Nous sommes trop peu renseignés sur les événemens de cette époque, et surtout sur les mobiles auxquels ont obéi ceux qui y furent mêlés, pour demander la révision du procès de Charles le Simple. Il avait au moins vu juste sur un point : il avait cru pouvoir faire confiance aux barbares du Nord, et sa confiance ne fut pas trahie. Rollon refusa de se joindre à ceux qui le détrônèrent. Mignet a dit de Richelieu comme suprême éloge : « Il eut les intentions des grandes choses qu’il fit. » Nul n’en dira autant de Charles le Simple assurément, mais une « grande chose » n’en reste pas moins attachée à son nom.


A. ALBERT-PETIT.