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entre les organes compétens, favorable et honorable pour les deux parties ; mais le fondement de cette paix ne peut être que celui-ci : que non seulement soit rétabli l’état de choses antérieur au Culturkampf, et que la parité, qui jusqu’ici n’existe que sur le papier, devienne enfin une vérité, mais qu’avant tout, une pleine sécurité soit offerte que la situation qui se prolonge depuis cinq ans ne se renouvellera pas.


Schorlemer-Alst parlait de remords, Virnich de garanties ; Schorlemer demandait que l’Etat se frappai la poitrine pour le passé ; Virnich, que l’Etat se liât les mains pour l’avenir. C’est à cette double invitation qu’aboutissaient, après cinq ans, les hostilités bismarckiennes.

Bismarck, aux heures où il projetait un début de résipiscence, aurait voulu qu’un geste de Rome, qu’un geste du Centre, gestes largement esquissés, bruyamment accomplis, lui permissent de déguiser sa propre volte-face : cette satisfaction lui était refusée. Au cours de la guerre, il avait sans cesse dit au Centre : « C’est vous qui avez commencé ; » mais s’il se sentait acculé à des négociations, on ne lui laisserait pas le privilège de dire au Centre : « C’est vous qui les avez entamées. »


IV

Il fallait donc qu’il avouât une erreur ; qu’il rebroussât chemin, sans que, sur la pente qu’il remonterait, personne vînt au-devant de lui. Mais cela, ce ne serait pas seulement une victoire pour le Centre ; ce serait une victoire pour tous les ennemis personnels du chancelier ; ils seraient là, aux écoutes, scandant les étapes de son recul, toisant sa posture de vaincu. « C’est un démon, criait déjà le comte d’Arnim ; il perd l’Allemagne par ses persécutions. Il fallait parler à Rome très haut, être très raide avec elle, mais traiter à merveille les évêques, et surtout ne restreindre à aucun degré les libertés catholiques ; la conduite du gouvernement est la conduite de sauvages. » Arnim, à vrai dire, n’était plus qu’une épave, mais l’impératrice Augusta pensait comme lui. Sa nature n’était pas celle d’une femme de lutte, mais Falk l’avait rendue telle ; discrète et tenace, elle luttait pour la tolérance contre l’intolérance de Falk. Bismarck sentait que, dans l’entourage même du souverain, le Culturkampf était exploité contre lui, et que les voix de paix qui se